L'île de Sein, distante d'à peine cinq kilomètres du continent, est-elle cette terre hostile décrite par ce père de famille désireux de récupérer la garde de ses enfants ? Oui, a répondu le juge aux affaires familiales de Montpellier, refusant à la mère qui envisageait d'aller s'installer sur l'île la garde de ses trois enfants. D'après le verdict, l'île de Sein "peut être assurément regardée comme étant un lieu de vie relativement hostile pour les enfants", rapporte Le Télégramme.
Au départ, une affaire familiale. Tout part de la requête de Jessica, une femme mère de trois enfants qui a refait sa vie avec un homme sur l'île de Sein. Désireuse de récupérer la garde de ses trois enfants qu'elle partage avec leur père à Montpellier depuis leur séparation en 2008, elle fait une demande au juge aux affaires familiales de la cité héraultaise où elle réside aussi. Le père, qui compte bien conserver la garde de ses enfants, choisit l'option offensive lors de l'audience qui s'est tenue le 30 juillet.
"A pied avec de petites charrettes". Face au juge, son avocate ne lésine pas sur la description de l'île. C'est une île "totalement isolée, sans eau courante et potable, sans électricité, à 8 kilomètres de la pointe du Raz, en plein océan Atlantique", attaque-t-elle, avant d'enfoncer le clou. "C'est une île dangereuse qui subit de nombreuses tempêtes. Il n'y a pas de voitures (...) Il y a 100 habitants en hiver et ces derniers se déplacent à pied avec de petites charrettes. Au mieux, on rejoint le continent en une heure de traversée, en bateau, par temps calme", dit-elle encore selon les propos retranscrits par Le Télégramme. Une partie - pas tous - de ces arguments ont fait mouche, le juge déboutant la mère. Principaux motifs avancés : l'île "peut être assurément regardée comme étant un lieu de vie relativement hostile pour les enfants" et les conditions de trajet "extrêmement difficiles" pour se rendre chez leur père.
Des "propos inacceptables". Le maire de cette commune qui recense 226 habitants selon l'Insee n'a pas du tout goûté les arguments avancés. "Je trouve ces propos inacceptables. Pour moi, une terre hostile, ça veut dire inhospitalière", a répondu Jean-Pierre Kerloc'h dans Le Télégramme. Au passage, le maire qui a écrit au tribunal de Montpellier pour se plaindre, "rappelle que nous disposons d'une école primaire et d'un collège, d'un cabinet médical et de plusieurs commerces". Quant à l'"extrême difficulté" pour rejoindre le continent avancée par l'avocate du père et confirmé par le verdict, il assure : "Très rares sont les jours où le bateau ne peut pas passer. Et en cas d'urgence (...) l'hélicoptère ne met que 20 minutes pour se poser au CHU de Brest". Enfin, Jean-Pierre Kerloc'h souligne l'avantage d'être enfant sur l'île. "Au moins, ils peuvent se rendre seuls à l'école sans crainte de faire une mauvaise rencontre".
"Week-end découverte" offert au juge. Ironique mais non moins fâché par le jugement, le président du conseil général Pierre Maille propose d'"offrir un week-end découverte de Sein aux juges et avocats montpelliérains". Une mère de famille rencontrée sur l'île par le quotidien régional confirme le bon vivre insulaire. "Ici, mes enfants vivent au grand air. Ils ne manquent de rien. Et il n'y a pas de danger".