La France rend mardi matin un hommage national aux sept soldats morts sur le front afghan début juillet, dans le cadre d’une cérémonie organisée aux Invalides, à Paris. "C’est un acte symbolique de reconnaissance auprès de gens qui font un métier qui est difficile et n’est peut-être pas suffisamment reconnu en France", s’est félicité mardi matin sur Europe 1 Joël Le Pahun, dont le fils a été tué dans une embuscade des talibans en août 2008.
Mais pour le père du caporal Le Pahun, cet hommage national fait aussi remonter de douloureux souvenirs. "Au travers des autres soldats, on voit toujours notre fils, en qualité de militaire, chaque militaire qui tombe, c’est toujours un bout de notre fils", a-t-il confié. D’autant que pour Joël Le Pahun, "c’est la cérémonie que je n’ai pas vécue il y bientôt trois ans puisque le 19 aout 2008, j’apprenais la mort de mon fils".
"Pas eu d’avancées, si ce n’est des pertes humaines"
Si l’hommage national présidé par Nicolas Sarkozy permet de montrer l’attachement de la nation à ses militaires, il n’empêche pas Joël Le Pahun de se montrer sceptique vis-à-vis de l’engagement français en Afghanistan. "Cela me fait du mal de dire ce genre de choses : si au moins la France laissait une trace en Afghanistan, mais ce n’est pas parti pour", estime-t-il.
"Il doit y avoir beaucoup d’incompréhension des familles qui ont déjà perdu un enfant et je crois qu’il va y avoir une incompréhension totale puisqu’effectivement, ce qui se passe aujourd’hui en Afghanistan, le retour des troupes va amener à quoi ? Simplement à avoir laissé du sang, le sang de nos enfants, et que l’Afghanistan redeviendra ce qu’il était auparavant", a-t-il déploré.
"Il n’y aura pas eu d’avancées, si ce n’est des pertes humaines", a souligné Joël Le Pahun :
Bientôt un monument pour l’Afghanistan
Interrogé sur la perspective de voir ériger un monument dédié aux soldats tombés sur le front afghan, le père du caporal Le Pahun y voit "une bonne idée car c’est déjà un acte de reconnaissance".
Mais "qu’un monument qui soit érigé pour des soldats morts au XXe siècle, c’est quelque chose d’assez affolant", a-t-il nuancé, avant d’ajouter : "on ne peut pas s’imaginer qu’aujourd’hui des soldats français fassent la guerre à l’étranger".
Embuscade en Kapisa : la justice traîne-t-elle des pieds ?
Revenant plus précisément sur le cas de leur fils, la famille du caporal Le Pahun tente toujours d'en savoir plus sur les conditions de sa mort. "Nous avons, avec plusieurs familles, porté plainte, non pas contre l’armée, non pas contre le gouvernement, simplement contre des officiers qui ont mal fait leur métier et qui ont amené beaucoup de gens à aller se faire tuer", dénonçant "des manquements en terme de commandement", a précisé Joël Le Pahun.
Et ce dernier de finir en confiant ses doutes sur la bonne volonté de l’Etat à faire toute la lumière sur cette affaire. "Aujourd’hui, les suites c’est un peu le status-quo, puisque le juge d’instruction devait instruire notre dossier, mais le parquet a fait appel. Le parquet dépend du garde des Sceaux, ce dernier dépend du président. Y a-t-il un lien de causalité ?", s’est-il interrogé.