Pendant deux semaines, ses proches l'ont cru morte. Alors que le personnel de l'hôpital préparait son entourage à débrancher le respirateur artificiel d'Angèle Lieby, dans le coma depuis quinze jours, la malade laisse échapper une larme. Une larme qui sauve in extremis cette Strasbourgeoise de 59 ans, qui a décidé de raconter son histoire dans un livre, Une larme m'a sauvée.
Tout commence le 3 juillet 2009, Angèle Lieby, victime d'un malaise après une migraine, est transportée à l’hôpital et plongée dans un coma artificiel. "Au bout du troisième jour, j'entendais tout mais je ne pouvais rien bouger parce que j'étais complètement paralysée. Je ne pouvais pas ouvrir les yeux, je ne pouvais plus rien faire. Il n'y avait que mon coeur qui battait. Je n'étais même plus capable de respirer", se souvient au micro d'Europe 1 Angèle Lieby. "J'entendais ma famille, mes amis, mes collègues. J'entendais tout et tout le monde me disait 'mais réveille toi'", poursuit-elle.
Prisonnière de son corps
Autour d'elle, tout le monde ignore qu'elle est prisonnière de son corps. Même le personnel hospitalier qui la considère déjà morte. "J'avais un problème aux sinus. Alors qu'on me nettoyait les sinus, j'ai entendu une infirmière qui disait 'on doit lui faire trois soins mais on ne va lui en faire qu'un parce que de toute façon, elle va bientôt clamser'", raconte Angèle Lieby. "J'ai horreur de ça. Je ne l'emploierais même pas pour un chien. Ce mot clamser, c'était l'horreur", regrette-t-elle.
"Tout le monde me disait 'mais réveille toi' ":
Une violence qu'elle a aussi ressenti dans sa chair. "C'était la pièce où ils se parlaient de leurs soucis personnels comme si je n'existais plus. Un médecin m'a fait très mal au niveau de la poitrine. Ensuite, il est revenu avec du monde et leur a dit "maintenant je vais vous montrer comment on procède pour voir si la personne est vivante ou morte"", se remémore la Strasbourgeoise. "C'est là qu'il m'a pincé le téton. C'est une douleur atroce. C'est comme si on vous arrachait un organe : l'oreille, le pied ou n'importe. J'étais restée inerte, comme si je n'étais plus là, alors que mon coeur battait", insiste-t-elle.
"Ne t'inquiète pas, on va s'occuper de papa" :
Le 25 juillet, jour de son anniversaire de mariage avec Raymond, tout bascule. "Ma fille me disait 'ne t'inquiète pas, on va s'occuper de papa' mais qu'il fallait quand même que je me réveille parce que quand bien même elle aurait un troisième enfant, il ne connaîtrait même pas sa mamie. C'est là que je me suis mise à pleurer", se remémore Angèle Lieby. "Elle s'est mise à crier 'maman pleure !'. On lui a alors dit 'non c'est le gel qu'on lui a mis dans les yeux' mais, elle était sûre que j'entendais. Elle avait vraiment vu que les larmes coulaient à ce moment-là", martèle l'ancienne ouvrière.
"Ces personnes peuvent souffrir"
A partir de là, tout s'enchaîne. "Après j'ai commencé à bouger le petit doigt. Deux ou trois jours après, j'ai ouvert les yeux. Il a fallu réapprendre à marcher, réapprendre tout", souligne Angèle Lieby. Aujourd'hui, elle souhaite avant tout que son histoire soit utile à d'autres. "Tant que le coeur bat, on est vivant. Pour le corps médical, si le cerveau est plat, c'est fini. Je dis l'inverse. Tant que le coeur bat, on est vivant", insiste Angèle Lieby. "Pour les gens qui ne peuvent pas parler, j'aimerais dire haut et fort que ces personnes peuvent souffrir. Il faut faire très attention et ne pas penser qu'ils sont un corps inerte qui ne ressent plus rien", conclut-elle.