Tuerie de Bruxelles : le "loup solitaire" existe-t-il vraiment ?

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DECRYPTAGE - Mehdi Nemmouche, le tireur présumé du Musée juif de Bruxelles a opéré seul. Le résultat d'un long cheminement avant le passage à l'acte. 

MENACE. "Loup solitaire" : deux mots devenus synonymes de menace terroriste depuis mars 2012 et les massacres commis par Mohamed Merah à Toulouse et Montauban. Deux ans plus tard, cette notion revient sur le devant de la scène avec la tuerie du Musée juif de Bruxelles et l'arrestation à Marseille de Mehdi Nemmouche, le tireur présumé, un Français de 29 ans qui se serait radicalisé en prison et aguerri en Syrie.

Mais qui est le "loup solitaire" ? Existe-t-il vraiment ? Qui se cache derrière ce terme parfois galvaudé, mot valise souvent trompeur quant à la réalité des faits. Europe 1 dresse le portrait de cette nouvelle menace. 

Quand c'est flou, il y a un loup

C'est le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, qui l'a lui-même déclaré lundi sur Europe 1 : Mehdi Nemmouche présente le "profil du loup solitaire", "l'enquête dira s'il a bénéficié ici ou là de complicités". Une déclaration qui permet de comprendre toute la complexité de cette notion lorsqu'elle est mise en perspective avec les propos de son prédécesseur place Beauvau, un an plus tôt, presque jour pour jour, le 23 mai 2013.

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Manuel Valls revenait alors sur le meurtre sanglant d'un soldat britannique dans les rues de Londres. Le ministre de l'Intérieur de l'époque évoquait une menace terroriste incarnée par "des petits groupes radicaux". "Ce ne sont pas des 'loups solitaires' contrairement à ce que j’entends ici ou là", arguait-il alors, précisant que le fait "d'agir seul ne signifie pas être isolé". Difficile donc d'y voir clair.

>> MISE A JOUR, le 10/06/14 à 19 heures : Bernard Cazeneuve est revenu sur ses propos le 10 juin devant la commission des Lois du Sénat. "Je veux ici récuser l'expression de 'loup solitaire' qui a fait florès lors de l'attentat commis par Mohamed Merah en mars 2012 à Toulouse et qui a connu une seconde vie pour qualifier Mehdi Nemmouche après la tuerie au Musée juif de Bruxelles", a finalement affirmé le ministre de l'Intérieur. "Tout passage à l'acte, aussi individuel soit-il, résulte d'un cheminement qui vient de loin", a-t-il notamment ajouté.

Internet, prison et combats à l'étranger

Dans cette même intervention du 23 mai 2013, Manuel Valls détaillait le cheminement qui mène ces terroristes jusqu'au passage à l'acte. "Ce type de terroriste se forme à travers un long parcours composé de relations sur internet, rencontres, la fréquentation de mosquées isolées, de passage en prison, de voyages à l’étranger, de séjours en camps d’entraînement. Ce n’est pas nouveau", détaillait-il. 

Mohamed Merah s'est radicalisé via son entourage familial, la prison et internet avant d'aller se former au maniement des armes dans les camps d'entraînement du Pakistan. Mehdi Nemmouche, pour sa part, se tourne vers le djihad à la faveur de séjours en prison entre 2007 et 2012. A peine libéré, il s'envole pour la Syrie, afin de grossir les rangs de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), un groupe de combattants djihadistes lié à Al-Qaïda disposant même d'une brigade francophone. Autant de preuves que les deux hommes présentent toutes les caractéristiques du combattant formé et surtout formaté. Un loup peut-être, mais nettement moins solitaire qu'il n'y paraît.

Homs Syrie

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Des actes pas si solitaires

 Certes, Mohamed Merah comme Mehdi Nemmouche, ont commis leurs massacres en opérant seuls. Mais la question des complicités locales reste aujourd'hui en suspens. Dans le dossier du "tueur au scooter" de Toulouse, deux personnes, dont le propre frère de l'homme abattu par le Raid le 22 mars 2012, ont été mis en examen, notamment pour complicité, et restent incarcérés.

Dans le cas de Nemmouche, qui pour l'heure reste muet en garde à vue, les policiers de la DGSI cherchent également à établir d'éventuelles complicités. Les enquêteurs tentent de savoir pourquoi le tireur présumé de Bruxelles a choisi de se rendre jusqu'à Marseille. C'est en effet dans cette même région qu'il s'est radicalisé en détention. Ainsi, les policiers du renseignement tentent de découvrir s'il y dispose de points de chute ou de contacts sur place de même qu'en Belgique.

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Un suivi plus complexe

 Les services de renseignements français ont failli dans le suivi de Mohamed Merah, entraînant leur profonde refonte et la création de la DGSI. Nemmouche, lui, avait été signalé dès sa sortie de prison. Mais il est difficile de mettre alors en place un suivi personnalisé. "Il faut savoir que le nombre de personnes qui se radicalisent en prison est considérable. Ce qui veut dire qu'à la sortie de prison ce sont des centaines de personnes que l'on trouve dans la nature", expliquait sur Europe 1 lundi, Louis Caprioli, ex-responsable à la DST. "Si la DGSI l'avait suivi, qu'est ce qu'elle aurait tracé ? On ne pouvait pas le poursuivre. Car aucun fait ne lui était reproché sur le plan pénal", note-t-il.

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C'est à l'échelon européen que le suivi flanche. A son retour en Europe via l'Allemagne et Francfort, Mehdi Nemmouche, désormais fiché en France comme dans l'UE, fait l'objet d'un signalement de la part des autorités allemandes. Avant de s'évaporer. "Cet individu, quand il quitte l'aéroport, il est tout seul dans la nature. Il eut été nécessaire qu'une équipe de surveillance allemande le prenne en charge pour le filocher, pour l'amener jusqu'à la frontière française", regrette Louis Caprioli.  Et c'est quand on perd sa trace que le loup se fait dangereux. 

Une menace réelle accentuée par la situation syrienne

Le "loup solitaire" tient en fait plus de la forme que du fond. En clair, il existe désormais un risque réel d'attaques menées par un seul homme ou par de petits groupes isolés en opposition aux attentats d'envergures tels que le 11 septembre 2001, les attentats de Madrid ou de Londres en 2004 et 2005.

Et la situation syrienne ne fait qu'accentuer la menace dite "intérieure" avec entre 2.000 et 3.000 Européens qui se sont rendus dans le pays depuis le début du conflit. On compterait notamment 800 Français qui ont souhaité y combattre, y ont combattu ou en sont revenus. 300 s'y trouveraient encore  : autant de "loups solitaires" potentiels. "Il s'agit de surveiller des centaines et des centaines d'individus", a assuré le Premier ministre Manuel Valls sur BFM-TV mardi, avant d'ajouter : "nous n'avons jamais été confrontés à un tel défi. C'est sans doute la menace la plus importante".  

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QUESTION - Y-a-t-il eu une faille des services de renseignement ?

ENQUÊTE - Ce qu'ont découvert les enquêteurs

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