Un délinquant sexuel sans surveillance

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et Lionel Gougelot

L’homme, récidiviste, a été libéré de la prison de Bapaume dans le Nord et ne subit aucun suivi.

C’est la préfecture du Pas-de-Calais qui a tiré la sonnette d’alarme. Un homme, délinquant sexuel récidiviste, a été libéré de prison fin décembre sans qu'aucun suivi médical ne lui soit prescrit. La préfecture a donc décidé de prévenir les services de gendarmerie et de police, par email, afin que l'homme puisse être surveillé, révèle la Voix du Nord, mercredi. Une initiative inédite de la part de la préfecture.

 

"Potentiellement capable de récidiver"

L’homme a été libéré de la prison de Bapaume après avoir purgé une peine de douze ans de réclusion criminelle pour "agression sexuelle sur mineur". Mais aucun suivi psychologique ne lui a été imposé et l’homme a toujours refusé de se soumettre à un suivi au cours de sa détention. Pourtant, il est jugé comme "potentiellement dangereux et capable de récidiver", selon les analyses médicales.

 

 

Dans son email, la préfecture insistait sur "la dangerosité de cet individu et le risque important de récidive", rapporte le quotidien. L’administration a même diffusé le nom de cet individu, sa photo ainsi que des éléments biographiques.

 

Une loi mais pas de moyens supplémentaires

 

Une démarche de mise en garde qui entre, en fait, dans le cadre de la loi de décembre 2005 sur la récidive des infractions pénales, un texte renforcé par la loi d'août 2007, dite loi Dati. La législation prévoit l'inscription des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes au fichier judiciaire automatisé. Mais l’initiative de la préfecture sonne comme un coup d’épée dans l’eau, estime Virginie Valton, secrétaire nationale de l'Union syndicale des magistrats. Les décrets d’application de la loi de mars 2007 n’ayant pas été publiés, les services de police et gendarmerie ne disposent d’aucun moyen supplémentaire pour assurer le suivi de ces individus dangereux.

 

"Ils vont être informés de l’arrivée de quelqu’un sur leur secteur, mais ils n’auront pas de service supplémentaire pour effectuer une surveillance accrue de cette personne", constate la magistrate, interrogée par Europe 1. "Il n’y aura pas non plus d’actualisation des données, c’est-à-dire que si la personne a donné son adresse à sa sortie de prison et que dès le lendemain elle déménage, les services de police et de gendarmerie n’en seront pas avisés", poursuit-elle.

 

 

En outre, la magistrate s’inquiète du "non respect de la présomption d’innocence" dans le cas de surveillance ou de filature d’un individu, même s’il est jugé dangereux. Car juridiquement l’homme libéré en décembre est redevenu un citoyen comme les autres.