"Bâtisse des années 50, bon état, comportant une nef de 26 mètres de long par 11,30 m pouvant accueillir plus de 200 personnes. Vitraux contemporains. Trois petites salles attenantes. Possibilité parkings. Proche services." Cette annonce pour mettre en vente une église de Vierzon se décline dans les agences immobilières locales comme n'importe quel autre bien. C'est donc tout naturellement que les responsables de la communauté marocaine de cette ville du Cher essaient de réunir les 170.000 euros nécessaires pour l'acquérir et lui donner une nouvelle vie plutôt inattendue... et source de polémique.
"La communauté musulmane s'est montrée intéressée pour créer un lieu de prière et notamment désengorger la mosquée de Vierzon", précise le père Alain Krauth, curé de la paroisse Notre-Dame, au micro d'Europe1. En concurrence avec de nombreux acheteurs potentiels - entreprises, artisans, particuliers, associations – la communauté marocaine réunira les fidèles dimanche pour tenter de collecter la somme demandée.
"Une peur parfois déraisonnée"
Mais le lieu de culte est loin de leur être acquis. Selon La Croix, Patrice Lemaréchal, économe du diocèse de Bourges, propriétaire de l'église, conscient que la décision de céder l'édifice à la communauté musulmane risque de ne pas faire l'unanimité parmi les paroissiens, prévient qu'aucune promesse de vente n'est encore signée: "notre souhait est de trouver l'acquéreur qui suscitera le moins d'émoi auprès de la population."
Effectivement, en sondant les habitants de la ville, quelques voix font déjà parvenir leur scepticisme. "Le site restera un lieu religieux. Mais bon… À premier abord, on aurait souhaité qu'il soit catholique. Je crois qu'on n'est pas habitué", confie au micro d'Europe1 Nicole, qui a fait sa première communion dans l'église.
"Certains seront favorables à ce que leur ancienne église continue à servir de lieu de culte à d’autres croyants, qui vivent un islam modéré, mais d’autres nourrissent une peur, parfois irraisonnée, face à l’islamisme radical, une peur renforcée par l’actualité de ces derniers jours", résume le père Alain Krauth dans La Croix, qui assure recevoir "plein de mails" de paroissiens, partisans comme opposants de la reconversion de l'église, depuis la publication de l'annonce.
"Le lieu n'a pas d'importance"
"Moi, je n'y accorde pas d'importance", assure, quant à lui, Hassan, musulman pratiquant. "À Jérusalem, sur l'Esplanade, des mosquées se sont transformées églises, puis retransformées en mosquée. Le lieu n'a pas d'importance tant qu'on a un espace pour prier", défend-il.
L'église Saint-Eloi, construite dans les années 1950, est l'une des cinq églises de la paroisse vierzonnaise. Selon le quotidien Le Berry Républicain, la décision de se séparer de l'église Saint-Eloi vient des fidèles eux même, en accord avec le curé et le diocèse. Les produits de la vente de l'église permettront la réorganisation immobilière de la paroisse, qui subit une baisse de fréquentation des fidèles.