Symphonie industrielle. "Intimité". Le titre de l’œuvre de Nicolas Frize est sans équivoque. En proposant six concerts du 31 janvier au 1er février à l’usine PSA de Saint-Ouen, le compositeur veut montrer "le rapport intime" que chaque salarié développe avec son travail. L’occasion de faire parler différemment de l’industrie automobile dont on parle généralement de façon trop "technique, anecdotique et négative" dans les médias au goût du musicien.
Immersion. Après deux ans d’immersion et d’écoute sur les chaînes de montage de la plus ancienne usine Citroën de France (1924), Nicolas Frize réhabilite donc les bruits des machines et les discussions des salariés à travers ses créations. Au fil de ses œuvres, les pièces automobiles résonnent comme des grosses caisses et tintent comme des cuivres pour former un orchestre industriel. La composition sera jouée par 90 participants, musiciens et choristes dont 17 récitants salariés lors des 6 concerts gratuits "déambulatoires" prévus au programme. 3000 spectateurs devraient suivre cette symphonie un peu particulière d’une école de Saint-Ouen jusqu'aux hangars de l’usine, exceptionnellement fermée pour l’occasion.
La musique adoucit les mœurs. Elle permet aussi aux salariés de PSA de réenchanter un lieu consacré au travail. "Au début j'étais dubitatif, mais je sens que ça m'a fait du bien", a confié Blilik Abdelaziz, 36 ans de travail chez PSA, dont 12 à Saint-Ouen au journaliste de l'AFP. "Ça me fait voyager par l'esprit. Ici, on est un peu en vase clos, alors c'est comme un grand soleil, ces gens qui arrivent dans l'usine et qui attachent tellement d'importance à un dessin, une photo ou un son". En deux ans d’immersion, Nicolas Frize a rencontré les 600 salariés de l’usine, dont 80 lors d’entretiens individuels. L’artiste n’en est pas à son coup d’essai puisque sa passion pour le monde du travail le pousse depuis 40 ans à vivre dans des ambiances particulières. Il a notamment vécu dans l’ancienne usine Renault de Boulogne-Billancourt et dans plusieurs centrales pénitentiaires. Grâce à lui, les habitués des embouteillages parisiens qui viendront au concert à Saint-Ouen vont se rendre compte que les voitures peuvent offrir autre chose qu’un concert de klaxons.