L'Union nationale de l'Apiculture française (Unaf) s'est alarmée jeudi de la récente autorisation en France de deux insecticides contenant "un nouveau néonicotinoïde", ce qui va, selon l'organisation, "vider de sa substance" l'interdiction des pesticides néonicotinoïdes, redoutables pour les abeilles, prévue en septembre 2018.
Deux néonicotinoïdes à la place d'un. L'Agence nationale de Sécurité sanitaire (Anses) a autorisé le 27 septembre le Closer et le Transform, deux insecticides fabriqués par Dow AgroSciences dont le principe actif est le sulfoxaflor. "On va remplacer les néonicotinoïdes qu'on va supprimer par un nouveau néonicotinoïde", a dénoncé le président de l'Unaf, Gilles Lanio, au cours d'une conférence de presse.
Une autre famille chimique. Pour Dow AgroSciences, filiale agricole du groupe d'agrochimie américain DowDuPont, le sulfoxaflor "n'est pas un néonicotinoïde". "Il appartient à une nouvelle famille chimique, les sulfoximines, qui est différente de celle des néonicotinoïdes", a déclaré Benoît Dattin, son responsable marketing et communication.
Le même mode d'action. Selon l'Unaf, le sulfoxaflor a toutefois "le même mode d'action que les autres néonicotinoïdes". "Une fois absorbée par la plante, [la molécule] circule dans son système vasculaire jusque dans ses parties florales, et donc le pollen et le nectar".
Selon Gilles Lanio, le sulfoxaflor "a été classé néonicotinoïde" par un tribunal aux États-Unis mais en France, le ministère de l'Agriculture "estime que ce n'est pas un néonicotinoïde" même s'"il agit pareil". "Il sera utilisé sur les céréales à paille, les légumes - on ne sait pas lesquels -, les pommiers et les cerisiers", a-t-il dit.
Aucun risque pour les abeilles selon Dow AgroSciences. Les néonicotinoïdes sont des substances neurotoxiques qui s'attaquent au système nerveux des insectes et ont de ce fait contribué au déclin des abeilles constaté notamment en Europe et en Amérique du Nord. "Tous les insecticides sont des neurotoxiques", mais le sulfoxaflor "agit sur des récepteurs différents" de ceux touchés par les néonicotinoïdes, affirme Benoît Dattin pour la société Dow AgroSciences.
"Il cible uniquement les insectes piqueurs-suceurs" comme les pucerons ou les cochenilles, dit-il. En outre, son action "va être très, très rapide mais après il va se dégrader" en quelques jours. "En respectant les doses homologuées et les précautions d'emploi, il n'y a aucun risque pour les abeilles", assure Benoît Dattin.
Ajouter le sulfoxator parmi les substances interdites. Les apiculteurs appellent le ministre de la Transition écologique à "sortir de sa torpeur" et demandé que le sulfoxaflor figure dans la loi sur la biodiversité. L'Anses doit rendre fin 2017- début 2018 deux avis sur les alternatives aux néonicotinoïdes.
Selon une enquête rendue publique jeudi par l'Unaf, en France, "au moins six millions d'hectares", sur une surface agricole utile estimée à environ 28 millions d'hectares, sont traités chaque année avec des insecticides néonicotinoïdes, via des traitements de semences (enrobages) ou par pulvérisation.