La cour d'appel de Bordeaux n'a pas reconnu jeudi de lien établi de causalité entre l'utilisation de pesticides et le cancer rare dont est décédé un ouvrier viticole en Gironde, Denis Bibeyran. "C'est ce que je redoutais le plus : c'est une décision de rejet pur et simple de la demande de reconnaissance post-mortem de maladie professionnelle. Le plus grave, ce sont les motifs de la cour d'appel", a déclaré Marie-Lys Bibeyran, la sœur de la victime et cofondatrice du Collectif Médoc Info Pesticides.
L'arsenic laissé en circulation pour la viticulture. La cour d'appel estime "que l'arsenic ne serait cancérogène que pour les tumeurs cutanées et pourrait être un anti-cancéreux pour les tumeurs digestives et notamment un cholangiocarcinome. Comme par hasard mon frère est décédé d'un cholangiocarcinome!", un cancer des voies biliaires, a expliqué la jeune femme, qui entendait poursuivre le "combat". Dans son arrêt, la Cour estime que la famille de Denis Bibeyran n'a pas "rapporté la preuve d'éléments établissant la réalité d'un lien de causalité entre l'exposition aux pesticides" et son cancer. "L'arsenic a été inscrit au tableau des (causes des) maladies professionnelles en 1955, interdit en 73 pour toute l'agriculture mais laissée en circulation pour la viticulture sur dérogation jusqu'en 2001", a rappelé Marie-Lys Bibeyran.
Exposé aux pesticides pendant 20 ans. Salarié agricole dans les vignes du Médoc pendant 32 ans, Denis Bibeyran est décédé le 12 octobre 2009, à l'âge de 47 ans, d'un cancer contracté dix mois plus tôt. Il était tractoriste et directement exposé aux pesticides pendant une vingtaine d'années. Sa sœur avait tenté sans succès dès 2011 plusieurs actions devant les instances de la Mutualité sociale agricole (MSA) pour faire reconnaître ce cancer comme maladie professionnelle. Le 7 janvier 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Bordeaux avait rejeté la demande de reconnaissance de maladie professionnelle, incitant Marie-Lys Bibeyran à faire appel de cette décision. "Aujourd'hui, les vignes professionnelles ont un reflet prestigieux à l'étranger (...) Aujourd'hui pour nous, les vignes bordelaises, c'est un cercueil à ciel ouvert", s'est-elle indigné.