Alors que la grève contre la réforme des retraites menace de s’amplifier, l’exécutif se serait sans doute bien passé d’une polémique visant son principal inspirateur. Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire aux retraites, est fragilisé par les 13 mandats qu’il a oubliés de mentionner dans sa déclaration d’intérêts. Si ce responsable garde la confiance du gouvernement, Anticor, l'association de lutte contre la corruption politique, a demandé à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique de saisir la justice. "Tout porte à croire que des poursuites seront engagées avec, in fine, une condamnation", a estimé lundi, au micro de Matthieu Belliard dans la matinale d’Europe 1, Jean-Christophe Picard, le président d’Anticor.
Du côté du gouvernement, on fait valoir la "bonne foi" de cet ancien chiraquien. "Lorsqu’il y a 13 omissions, cela devient compliqué de plaider la bonne foi", ironise le président d’Anticor. "L’intérêt de ces déclarations est qu’elles soient complètes et sincères. Si on commence à tolérer un oubli, on vide le dispositif de son sens", explique-t-il. "Le fait de ne pas remplir sa déclaration est un délit pénal passible de 45.000 euros et de trois ans de prison. C’est assez grave", rappelle Jean-Christophe Picard. "Il est parfaitement incompatible d’exercer une activité professionnelle tout en étant membre du gouvernement. C’est quelque chose que l’on n’avait jamais vu", s’indigne cet avocat. De fait, cette interdiction figure dans la Constitution elle-même.
"Ils vont l’exfiltrer comme ils l’ont fait pour Richard Ferrand"
De son côté, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique doit annoncer mercredi si elle estime que la justice doit être saisie, ou pas, dans cette affaire. Mais pour Jean-Christophe Picard, quelle que soit la décision de cette instance, le maintien de Jean-Paul Delevoye au gouvernement n’est plus envisageable. "Vu l’ampleur des omissions, la question ne se pose même plus", explique-t-il. "Comment voulez-vous travailler avec des personnes qui n’arrivent même pas à remplir une déclaration de cinq pages ?"
"Ils vont l’exfiltrer comme ils l’ont fait pour Richard Ferrand. Ils vont lui trouver un point de chute", poursuit-il. Visé en mai 2017 par des accusations de favoritisme, Richard Ferrand, alors ministre de la Cohésion des territoires, avait été renvoyé fin juin dans l’hémicycle pour postuler à la présidence du groupe La République en marche.