Lundi soir passe sur TF1 un téléfilm, dont Europe 1 est partenaire, Jacqueline Sauvage : c’était lui ou moi. Un téléfilm, adapté du roman de Jacqueline Sauvage, Je voulais juste que ça s'arrête. Chez Christophe Hondelatte lundi, Frédéric Chevallier, avocat général lors du deuxième procès d’assises, revient sur l'affaire.
Une première condamnation à 10 ans de réclusion criminelle. Le 10 septembre 2012, il est 19h27 lorsque les pompiers du Loiret reçoivent un appel téléphonique. Au bout du fil, une femme, Jacqueline Sauvage. Elle explique qu'elle vient de tirer sur son mari. Aux gendarmes, elle raconte que Norbert Marot l'a frappé. Chez elle, cela a fait "comme une étincelle". Jacqueline Sauvage s'est alors rendu dans sa chambre, a pris la carabine, et elle a tiré à trois reprises sur son mari, alors qu'il était assis de dos sur la terrasse.
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Le premier procès de Jacqueline Sauvage a lieu à la fin du mois d'octobre 2014. À l'époque, l'affaire ne rencontre pas l'exposition médiatique que connaîtra l'affaire par la suite. À la barre, Jacqueline Sauvage explique qu'elle a beaucoup souffert. Norbert Marot était violent avec elle, avec ses enfants. Les filles viennent confirmer les dires de leur mère. Leur enfance a été un enfer, Norbert Marot a notamment abusé d'elles, expliquent-elles. Si Jacqueline Sauvage n'a rien dit, c'est qu'elle avait peur et qu'elle était sous son emprise. Les jurés ne retiennent pas la préméditation, mais ils condamnent Jacqueline Sauvage à 10 ans de réclusion criminelle, alors qu'elle encourait 30 ans. Jacqueline Sauvage fait appel.
"Dix ans de réclusion criminelle, c’était la peine minimale". Le procès en appel s'ouvre onze mois après le premier procès, le 1er décembre 2015. Entre temps, les médias se sont emparés de l'affaire, le premier verdict a été très commenté. Ce second procès dure trois jours, comme le premier, et à la fin, Jacqueline Sauvage est de nouveau condamnée à 10 ans de réclusion criminelle. "C'était une peine qui prenait totalement en considération les faits de violence que madame Sauvage disait avoir subi", explique Frédéric Chevallier, avocat général lors du deuxième procès d’assises. "Dix ans de réclusion criminelle, c’était la peine minimale. Elle s’en sort justement quand elle prend 10 ans", estime-t-il.
Au micro d'Europe 1, Frédéric Chevallier justifie son intime conviction. À ses yeux, "la vérité judiciaire établit aux termes d’une année d’instruction, de deux procès d’assises, d’expertises judiciaires" a démontré que Jacqueline Sauvage n'était pas une femme soumise, qu'elle ne baissait pas les bras. L'avocat général lors du deuxième procès d’assises a acquis la certitude que Jacqueline Sauvage n'était pas "une femme faible" et que si elle voulait partir, elle aurait pu le faire. "On ne connaît pas madame Sauvage, mais moi, j’ai la prétention de la connaître un petit peu à travers un dossier d’instruction que je connais assez bien", souligne-t-il.
Christophe Hondelatte et Frédéric Chevallier ©Europe 1
Médiatisation de l'affaire. Ce second verdict suscite à nouveau l'indignation. Sur Internet, une pétition circule pour demander la grâce présidentielle de Jacqueline Sauvage. En trois semaines, elle recueille 400.000 signatures. Des célébrités prennent fait et cause pour Jacqueline Sauvage, à l'image d'Eva Darlan ou encore d'Anny Duperey. Côté politique, également, on se mobilise. Valérie Boyer, députée LR, écrit à François Hollande et demande la grâce présidentielle. Elle est suivie par 36 députés et sénateurs.
Les trois filles de Jacqueline Sauvage font alors une demande de grâce écrite à François Hollande, qui n'est pas un grand partisan de ce processus. Mais il suit la procédure. La demande est transmise au bureau des grâces et il demande leurs avis aux procureurs des deux procès : celui d'Orléans et de Blois. Les deux répondent que la grâce n'est pas justifiée.
Finalement, après avoir accordé une grâce partielle qui n'a pas débouché sur la libération de Jacqueline Sauvage, le 28 décembre 2016, François Hollande lui accorde la grâce présidentielle totale. Elle sort de prison quelques heures plus tard. Une "décision consternante" pour la présidente de l'USM (Union syndicale des magistrats), qui estime qu'il s'agit là d'"une atteinte totale aux décisions de justice". "Il y a deux vérités : une vérité judiciaire et une vérité politique. (...) Je suis extrêmement déçu quand je l'entends dire (Jacqueline Sauvage, ndlr) sur un plateau TV qu'elle n'est coupable de rien", conclut Frédéric Chevallier.