Affaire Tapie : la Cour de cassation valide l'annulation de l'arbitrage

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C.P.-R. avec AFP , modifié à
La haute juridiction a estimé, jeudi, qu'il y avait bien eu "fraude" dans l'arbitrage rendu en faveur de Bernard Tapie, en 2008, dans son conflit l'opposant au Crédit Lyonnais.

La Cour de cassation a confirmé, jeudi, l'annulation de l'arbitrage qui a soldé, en 2008, le litige de Bernard Tapie avec le Crédit lyonnais sur la revente d'Adidas, en accordant 404 millions d'euros à l'homme d'affaires avec les intérêts. C'est un nouveau coup dur pour Bernard Tapie dans ce conflit qui dure depuis plus de 20 ans. Toutefois, l'homme d'affaires dispose encore de recours, dont il compte bien user, pour retarder le remboursement des millions qui lui ont été accordés suite à cet arbitrage, désormais annulé. 

L'aspect frauduleux de l'arbitrage confirmé. Dans son arrêt, la plus haute juridiction estime que la cour d'appel de Paris a eu raison d'annuler, en février dernier, cette sentence arbitrale au vu du "concert frauduleux ayant existé entre l'un des arbitres, Pierre Estoup, et Bernard Tapie". La cour d'appel avait alors jugé que "les liens anciens, étroits et répétés" entre Pierre Estoup et l'avocat de Bernard Tapie, Maurice Lantourne, remettaient en cause l'impartialité de cette décision.

Jugeant cette argumentation "tirée par les cheveux, pour satisfaire à une volonté purement politique", le couple Tapie s'était pourvu en cassation. Mais dans son arrêt jeudi, la Cour de cassation a confirmé la décision de la cour d'appel, estimant que la"dissimulation" de ces relations "participait à l'accomplissement du dessein ourdi par l'arbitre" : favoriser le clan Tapie.

Arbitrage "international" ou non ? Dans son pourvoi, la défense de l'ancien ministre de François Mitterrand arguait également que la cour d'appel de Paris était incompétente pour juger cette affaire, car l'arbitrage était "international". Elle réclamait ainsi la constitution d'un nouveau tribunal arbitral. Mais la Cour de cassation a, au contraire, confirmé que la cour d'appel était bien compétente pour trancher sur ce dossier, soulignant que "les litiges dont les arbitres étaient saisis ne portaient que sur des opérations qui se dénouaient économiquement en France".

Un coup dur pour Tapie... La décision de la haute juridiction est donc une bataille de plus perdue par Bernard Tapie. Car en décembre dernier, l'ex-patron de l'Olympique de Marseille a été condamné dans un autre arrêt de la cour d'appel de Paris, à rembourser les quelque 404 millions d'euros - intérêts compris - obtenus grâce à cet arbitrage favorable, en 2008. Au titre du seul préjudice moral, l'homme d'affaires s'était notamment vu allouer 45 millions. Mais la justice a considéré que Bernard Tapie n'avait pas été lésé dans son conflit l'opposant au Crédit Lyonnais, et donc qu'il devait rendre l'argent à l'Etat. 

... Cependant, l'homme d'affaires n'a rien remboursé à ce jour. Il a mis son Groupe Bernard Tapie (GBT) en sauvegarde, et a déposé un autre pourvoi en cassation contre cette condamnation à rembourser. Ce recours doit être examiné ultérieurement par la Cour de cassation. "Nous n'avons pas été condamnés définitivement à rembourser. Nous allons nous battre et nous irons aussi devant la Cour européenne des droits de l'Homme", a assuré jeudi l'avocat de Bernard Tapie, Me Thiriez. Par conséquent, si les époux Tapie devront bien rembourser in fine les millions perçus, ce volet de l'affaire risque de traîner encore. 

Une enquête pénale... Par ailleurs, l'arbitrage Crédit Lyonnais-Tapie est au cœur d'une enquête pénale pour escroquerie en bande organisée. Hasard du calendrier, les juges d'instruction ont notifié, jeudi dernier, la fin de leurs investigations après près de quatre ans d'enquête. Dans ce volet pénal du dossier, six personnes sont mises en examen, dont Bernard Tapie, Maurice Lantourne, Pierre Estoup et Stéphane Richard, ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy et actuel patron d'Orange.

... sur le rôle de l'exécutif. Vendredi, la Cour de cassation examinera un autre recours lié à cette affaire politico-judiciaire, où le rôle qu'aurait pu jouer l'Elysée à l'époque est en ligne de mire. Renvoyée devant la Cour de justice de la République (CJR), la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, a en effet intenté un pourvoi devant la haute juridiction, pour tenter d'éviter ce renvoi. A l'époque ministre de l'Economie, Christine Lagarde a en effet été mise en examen pour "négligence" dans sa gestion de l'arbitrage Crédit Lyonnais-Tapie, rendu en faveur de l'homme d'affaires.