Un an après l'attentat de Nice, les associations de victimes du terrorisme se trouvent à nouveau au cœur de l'attention médiatique et entendent en profiter. Le 10 juillet, cinq d'entre elles ont adressé une lettre ouverte pour réclamer une "aide efficace" à Emmanuel Macron. Au centre de la missive : la non-reconduction du poste de secrétaire d'État à l'aide aux victimes au sein du gouvernement d'Édouard Philippe. Une magistrate, Elisabeth Pelsez, a bien été nommée déléguée interministérielle, mercredi. Mais ses attributions ne recouvrent pas les attentes des victimes et de leurs proches, explique à Europe1.fr Georges Saline, président de "13-Novembre : Fraternité et Vérité".
Quels étaient les liens entre les associations de victimes et le secrétariat d'État ?
Sa création avait d'abord eu quelque chose de symbolique : on nommait quelqu'un au gouvernement, pour s'occuper uniquement des victimes, auprès du Premier ministre. C'était une réaction à un constat : les choses avaient très mal marché après le 13-Novembre. Il y avait eu de nombreuses carences dans l'information des familles, plein de problèmes dans la prise en charge des soins. Beaucoup de points restaient à régler et Juliette Méadel a eu une action déterminante : elle a réuni tous les acteurs et les administrations concernés, organisé des tables rondes. On était parvenus à de vraies avancées.
Lesquelles, par exemple ?
La prise en charge des soins psychiatriques, qui étaient remboursés aux victimes comme à n'importe qui d'autres : ceux qui choisissaient d'aller voir un psychologue, donc pas un médecin, ou un psychiatre pratiquant le dépassement d'honoraires, n'étaient pas intégralement couverts. Ça a changé. D'autres chantiers sont encore en cours : on réclamait la reconnaissance d'un préjudice d'angoisse pour les victimes qui ont survécu, et d'un préjudice d'attente pour les familles. Nous avons obtenu un accord de principe, mais on ne sait rien de la manière dont ce préjudice va être traité. La suppression des secrétariats est inquiétante à cet égard.
Des secrétariats ? Il y en avait plusieurs ?
Oui, il y avait le secrétariat d'État, mais aussi un secrétariat général à l'aide aux victimes, peut-être encore plus important. Dirigé par un préfet, rattaché à Matignon, il était composé d'une équipe de fonctionnaires venant des différents ministères, ce qui permettait d'aborder toutes les problématiques complexes qui nous concernent. À la base, rien n'était prévu pour le remplacer, ce n'est que sous la pression que nous avons obtenu la nomination d'une déléguée interministérielle à l'aide aux victimes, une magistrate, rattachée au ministère de la Justice. À notre connaissance, le système des représentants des autres ministères ne sera pas reconduit. Or, il est évident que les besoins des victimes ne sont pas uniquement judiciaires : il est aussi question de retour à l'emploi ou aux études, de logement, de transports, et surtout de santé. C'est en cela que le dispositif supprimé faisait parfaitement sens.
Pourquoi pensez-vous que l'ancien dispositif n'a pas été reconduit ? Est-ce parce que les principaux attentats de masse s'éloignent dans le temps ?
Si c'est la raison, les bras m'en tombent ! Nice, c'était il y a un an. Depuis, la France n'a cessé de déjouer des projets terroristes et le Royaume-Uni a été frappé plusieurs fois. Lors de son discours devant l'Assemblée nationale, le Premier ministre lui-même a expliqué qu'il fallait s'attendre à d'autres attentats ! Supprimer ces secrétariats était une erreur. J'espère juste que nous n'aurons pas à en payer le prix dans l'urgence, si une nouvelle attaque devait se produire.