Trois jours après la mort d'un prêtre à Saint-Etienne-du-Rouvray, l'imam de Bordeaux affirme dans un entretien accordé au Point jeudi qu'il "attend son tour" après avoir reçu des menaces de l'organisation djihadiste Etat islamique (EI). Il revient aussi sur les causes, selon lui, qui expliquent le succès du djihadisme auprès d'une frange de la jeunesse française. Les imams, explique-t-il, ont "leur part de responsabilité".
Un "imam de la République", "cela les dérange". Si l'EI a menacé l'église catholique d'attentats, il menace aussi les musulmans dont l'idéologie et la pratique ne correspondent pas à ce qu'il prône, rappelle Tareq Oubrou : "j'ai été menacé à trois reprises par Daech. Je suis un imam de la République, un religieux 'trop cool'..., cela les dérange". Même si il a conscience que son nom figure "sur la liste des gens à abattre", il a refusé "les gardes du corps" proposés par la police et dit "attendre son tour".
Des jeunes déracinés. Pour le recteur de la mosquée de Bordeaux, les racines du mal terroriste se trouvent dans un "certain nombre de dysfonctionnements" comme "l'échec scolaire et l'exclusion sociale". En effet, selon le religieux connu pour sa lecture libérale du Coran, les terroristes ont "un rapport identitaire à la religion, et non spirituel". Un palliatif selon lui à leur absence d'enracinement, que ce soit dans la culture d'origine ou dans la culture française.
Des dirigeants de mosquées, "pas toujours compétents". Mais l'imam girondin jette aussi la pierre à l'islam français. Pour lui, les imams "ont leur part de responsabilité dans le phénomène de radicalisation". Et de pointer du doigt les dirigeants des mosquées, pas toujours les plus compétents ou des sermons en langue arabe. Alors qu'en face, Daech traduit "en français" son "discours simpliste". "Nous, imams de France, devons faire de la théologie préventive", "faire attention aux versets (du Coran, ndlr) que nous choisissons" et "aux commentaires qui accompagnent nos lectures".