Pour son ancien maire, Philippe Moureaux, Molenbeek n'a rien "du trou à rats" évoqué par Donald Trump. Mais la criminalité locale, la montée du radicalisme religieux et les "défaillances" de la police expliquent que des petits caïds comme Abdelhammid Abaaoud ou les frères Abdeslam ont pu y trouver un terrain idéal pour préparer les attentats de Paris.
L'ancien maire ne se sent "absolument pas responsable". A 76 ans, Philippe Moureaux, ex-ministre de la Justice et figure du Parti socialiste francophone belge, ne se sent "absolument pas" responsable du drame qui s'est déroulé le 13 novembre (130 morts et plus de 350 blessés). Il sort vendredi un livre intitulé La Vérité sur Molenbeek (Editions "La Boîte à Pandore", 172 pages). "Quand j'ai vu monter le radicalisme, j'ai essayé de le contrer. Je suis le premier maire à avoir interdit le voile intégral en Belgique", se défend Philippe Moureaux dans un entretien accordé à l'AFP.
Ce qui est "dramatique" : cette cellule autour d'Abaaoud". "Ce qui est propre à Molenbeek, et c'est dramatique, c'est cette cellule, qui à un moment donné se constitue autour d'Abdelhamid Abaaoud (organisateur présumé des attentats revendiqués par l'Etat islamique)", reconnait l'ancien bourgmestre de la commune populaire du nord de Bruxelles entre 1992 et 2012. "Abaaoud, qui est plutôt un enfant d'une famille moyennement aisée, va partir (en Syrie) et il va alors se comporter d'une façon particulièrement violente. Beaucoup ont vu ces images atroces où il traîne des cadavres", rappelle-t-il.
Le terreau du terrorisme : amalgame entre délinquance et violence. "C'est l'amalgame entre délinquance classique et goût de la violence" qui fait le terreau de ceux qui deviendront des djihadistes, analyse-t-il. "Ensuite, une espèce de justification, qui est la religion, vient se rajouter. Les frères Abdeslam (Brahim, qui s'est fait exploser dans l'est parisien le 13 novembre, et Salah, suspect clé toujours en fuite), sont assez caractéristiques. Ils sont dans la petite délinquance, ils vont tout d'un coup être fascinés par leur ancien copain Abaaoud, et c'est en quelques mois, quelques semaines, qu'ils vont basculer dans le radicalisme religieux", raconte l'ancien bourgmestre.
Pour Philippe Moureaux, c'est loin d'être fini à Molenbeek. La "frange" de la population qui continue à soutenir les djihadistes "est à mon avis en train d'un peu grandir", avertit-il. "Quand on dit qu'on va bombarder Molenbeek, ça alimente le radicalisme", déplore-t-il en évoquant des commentaires du polémiste Eric Zemmour. "Ça leur permet de dire: "Regardez comment ils vous traitent' ".