L'association UFC-Que choisir a pointé du doigt mercredi dans une étude une forte hausse des complémentaires santé. Après avoir passé au crible 500 contrats de 86 organismes différents, elle juge l’inflation médiane des tarifs aux alentours de 5%, avec certains organisme où les tarifs ont explosé : +12% pour Swiss Life, par exemple. Albert Lautmann, directeur général de la Fédération nationale de la Mutualité Française, conteste les chiffres données par l’association de consommateurs. "Je persuadé que cette étude a tendance à exagérer la hausse des complémentaires santé parce que la méthode choisie n’est pas exhaustive", a-t-il réagit mercredi sur Europe 1
Le vieillissement du pays entraîne plus de demandes d'accès aux soins
Pointant la forte concurrence qui existe dans le secteur, Albert Lautmann explique que "le marché s’est structuré autour de tarifs en fonction de l’âge". Selon lui, l'étude ne peut donc pas être correcte, puisqu'il existe des variations de tarifs liées à l'âge. "Cela donne le sentiment que les tarifs augmentent plus que la réalité."
Par ailleurs, le directeur général de la Fédération nationale de la Mutualité française estime que "comparer les dépenses de santé avec l’inflation n’a pas de sens". "Notre pays vieillit, plus il y aura de personnes âgées, plus il y aura de dépenses de santé. Ce n’est pas une mauvaise nouvelle, on aspire tous à être bien pris en charge, le plus longtemps possible. Il y aussi des maladies longues, chroniques qui deviennent des maladies de masse.
Un effet de "rattrapage"
L'association UFC-Que Choisir estime le surcoût sur l’année supérieur à 80 euros dans un cas sur deux et supérieur à 150 euros dans un cas sur cinq. Selon le directeur général de la Fédération nationale de la Mutualité Française, cela peut s'expliquer par un effet de "rattrapage", après des années où les prix n'ont pas augmenté. "Les tarifs en 2020 ont augmenté de 2 à 3%", explique-t-il.
"Cela ne veut pas dire que certains Français n’ont pas des cotisations qui ont augmenté de 5 ou 6%. Certaines complémentaires n’ont pas augmenté une année, alors il existe un effet rattrapage. Il peut y avoir des contrats collectifs sur lesquels l’intensité de la concurrence avait eu tendance à sous-estimer les dépenses pour certains acteurs, et donc il peut y avoir un effet rattrapage."
"Pas d'impact significatif" du reste à charge zéro
Alors que l'UFC-Que Choisir pointe un lien de cause à effet entre l'inflation des tarifs et la mise en place du reste à charge zéro sur les lunettes et les soins dentaires, là aussi, Albert Lautmann nie en bloc. "En réalité, il n'y a pas d'impact significatif de la réforme du reste à charge sur les lunettes et les soins dentaires dans les tarifs des mutuelles ou des complémentaires santé." Depuis le 1er janvier 2020, un panier de soins optiques et dentaires est intégralement remboursé.
"Le reste à charge zéro est une bonne réforme, équilibrée, qui demande des efforts à l’ensemble des professionnels de santé qui sont entrés dans une logique de tarifs plafonnés", poursuit le président de la Fédération nationale de la Mutualité française. "Auparavant par exemple, les tarifs des prothèses dentaires étaient libres. Il y a eu des efforts sur la marge, par l’Assurance maladie obligatoire et par les complémentaires santé. Nous estimons que l’impact de la réforme pour les dépenses des mutuelles, et donc pour leurs cotisations, est de l’ordre de 1% sur trois ans, ce qui est assez mineur."
La concurrence pour diminuer les prix ?
Pour l'UFC-Que Choisir, il est nécessaire d’anticiper la résiliation des contrats, prévue au plus tard pour le 1er décembre. Faire jouer la concurrence pour diminuer les prix est une mauvaise analyse, selon Albert Lautmann. "Nous ne partageons pas cet avis. C’est au contraire le développement très fort de la concurrence depuis des années qui a fait que les mutuelles sont obligées de s’aligner et de faire varier leurs tarifs en fonction de l’âge."
Selon lui, il est préférable de comparer les garanties des mutuelles plutôt que de leurs tarifs. "Les premières dépenses des complémentaires santé aujourd’hui, ce sont les hôpitaux. Il faut comparer la mutuelle sur les garanties sur l’hôpital, sur le maintien de salaire ou pas." Néanmoins, le directeur général concède que "la demande de santé est forte dans notre pays, et on a l'idée que la santé ne doit rien coûter. Il n’y a pas d’autres moyens que de répercuter sur les cotisations l’évolution des dépenses des mutuelles. Il n’y a pas de trésor caché, ni de solution facile."
Face aux tarifs, certains pourraient renoncer aux soins ou à la souscription d'une mutuelle. "Il y a certains jeunes qui se disent qu'ils n'ont pas besoin de lunettes, qu'ils sont en bonne santé. Mais c'est une erreur : les premiers postes de remboursement sont les dépenses hospitalières". "Hormis ceux qui sont en affection longue durée, ou qui ont des pathologies 100% prise en charge par la sécurité sociale, un euro sur deux est aujourd'hui à la charge de la complémentaire", rappelle-t-il.