C’est un groupe secret qui partageait des photos de femmes nues à leur insu. Le groupe Facebook "Babylone 2.0" a été fermé le 5 janvier et fait l’objet d’une enquête en Belgique après avoir été signalé par des internautes. Né en Belgique, ce groupe secret francophone, composé de quelque 52.000 membres, publiait des photos privées ou volées de femmes nues ou en petite tenue, ainsi que des selfies envoyés par ces conquêtes des membres du groupe.
L’existence du groupe secret - introuvable sur le réseau social pour les non-membres - a été révélée par une blogueuse belge le 5 janvier : "À l’origine, c’est une journaliste du (site belge) Le Vif qui a eu le contact d’une fille ajoutée par erreur sur le groupe. Elle a fait plein de captures d’écran et me les a envoyées", explique Chrystelle Charlier, auteure du site 2 girls 1 mag, à Europe1.fr. Sur les captures d’écran, dont Europe1.fr a eu connaissance, les membres relaient des photos de leurs conquêtes "certifiées pêches perso", selon leurs propres mots, pour se vanter mais aussi pour dénigrer et humilier les femmes.
"C'est pas une bonne pêche ça, les gars ?"
"Voilà une pêche slovène", "C’est pas une bonne pêche, ça les gars ?", "Je vous offre mon stock de pêches" : tels sont les posts mis en ligne par les membres du groupe, accompagnés de photos de paires de fesses ou de seins. Sur l’une des publications, un homme partage ainsi la photo des fesses d’une femme penchée, photo prise manifestement à son insu, en commentant : "C’est très loin de l’avion de chasse qu’on traque tous, certes, mais du haut de mes 27 ans, je ne pouvais refuser ce taudis de 44 ans, juste pour rajouter une ligne sur le CV. Vieille peau, on ne recule pas devant le défi."
Lorsque des fuites ont commencé à circuler sur l’existence de "Babylone 2.0", les membres du groupe ont lancé une "chasse aux meufs", selon les termes dictés par un homme dans un post, pour enlever toutes les filles membres du groupe. Ils ont aussi mis en garde les participants : "Faites gaffe les gars, il y a plein de meufs qui balancent… Évitez d’en parler à des meufs", "Il faut inspecter le profil de toutes les personnes qui entrent", "Où sont les collabos qu’on les nique ?", peut-on ainsi lire sur ces publications.
Le groupe aurait muté en "Babylone 3.0"
Les nombreux signalements des internautes ont conduit à la fermeture du groupe jeudi. La justice belge, et notamment le FCCU (l’entité de la direction centrale de lutte contre la criminalité sur Internet), a ouvert une enquête dans la foulée. Selon Chrystelle Charlier, il y circulait des photos de mineures ainsi que des numéros de téléphones. Depuis, le groupe aurait muté sous le nom "Babylone 3.0", mais impossible de le vérifier puisqu’il s’agit d’un groupe secret. Toutefois, sur la page publique Babylone 2.0, les internautes semblent avoir trouvé des groupes fermés apparentés à "Babylone 2.0".
En publiant des photos de femmes nues à leur insu, "Babylone 2.0" bafoue le respect de la vie privée de ces femmes mais aussi les règles d’utilisation de Facebook. Sur son site, le réseau social précise que sont supprimées "les photographies présentant des organes génitaux ou des fesses entièrement exposées". Des règles qui s’appliquent à tous les contenus, y compris sur les groupes secrets, a assuré une source interne de Facebook à Europe1.fr.
Les groupes secrets continuent de prospérer
Pourtant, plusieurs signalements ont été faits auprès du réseau social et se sont vus répondre que "Babylone 2.0" respectait les conditions d’utilisation du réseau. "J’ai fait le signalement et on m’a répondu que le groupe correspondait aux standards d’utilisation", s’insurge Chrystelle Charlier. Une réaction pour le moins étonnante alors que Facebook a par le passé censuré de nombreuses images pour cause de nudité. Sur Twitter, d’autres internautes se sont indignés de recevoir la même réponse.
Facebook qui autorise un groupe secret "public" de 52000 porcs décérébrés. C'est HONTEUX et je suis triste #Babylone20@facebook#shameonyoupic.twitter.com/pyz2pHK3ke
— Laure-Anne Losfeld (@l_a_losfeld) 6 janvier 2017
"Babylone 2.0" n’est qu’un groupe secret parmi d’autres. "Il y en a plein d’autres !", assure Chrystelle Charlier, citant entre autre le groupe secret "Garde ta pêche perso". "Il a été fermé mais s’est muté en ’Partage ta pêche perso’. Le groupe en serait à sa 6ème ou 7ème page", ajoute-elle. Cette dernière a lancé jeudi une pétition à l’intention du Premier ministre belge Charles Michel et du président français François Hollande, pour qu’une loi soit votée contre le forwarding d’images privées. Facebook rappelle de son côté que c’est à la communauté d'internautes de procéder aux signalements d’abus. Problème : les signalements ne peuvent être faits que si on est membre du groupe secret. En somme, seul "un repenti" peut limiter la pérennité de ce type de groupes dont les pratiques rappellent le "revenge porn".