Alors que le bac débutera officiellement le 15 juin avec la traditionnelle épreuve de philosophie, le stress monte pour les quelque 700.000 lycéens qui passent l'examen final cette année. Et pour certains, cette période peut être vécue comme un vrai moment de pression... En 2014, une enquête réalisée par la Smerep (Sécurité mutualiste étudiante régionale) auprès de 1.200 personnes âgées de 18 à 24 ans révélait qu'un jeune sur quatre serait susceptible d'être "sujet au burn-out".
Mais, cet état d'épuisement professionnel extrême, déjà discuté chez l'adulte et non reconnu comme maladie professionnelle, peut-il s'appliquer aux bacheliers ? Sur cette question, les professionnels sont divisés.
"Oui, il existe un burn-out du bac ! ". Pour la psychothérapeute Béatrice Millêtre, la réponse semble évidente. Selon l'auteure du Burn-out des enfants, "le burn-out est une forme d'épuisement extrême qui n'est pas réservé aux adultes. Les lycéens, et notamment les bacheliers, ont aussi des obligations de résultats, puisque leurs parents attendent d'eux qu'ils rapportent de bonnes notes à la maison. De plus, ils ont des échéances fréquentes avec les épreuves des bacs blancs. A leur manière, ils sont donc insérés dans la vie active. "
La psychothérapeute détaille : "Le lycéens en proie au burn-out est celui qui ne voit plus l'intérêt à passer le bac. Il ne comprend pas ce qu'il fait dans sa filière, ne se sent plus concerné. Il est moralement loin de l'examen. Il faut différencier l'enfant juste stressé ou fatigué de celui en burn-out. Souvent, les adolescents que je vois et chez qui je repère une forme de burn-out sont ceux qui ont été contraints de suivre un certain cursus. Par exemple, je vois souvent en consultation des élèves qui auraient aimé suivre un cursus ST2A (Sciences et technologies du design et des arts appliqués), mais qui ont été contraints par leurs parents ou professeurs à rester dans la voie générale. "
"Je ne vois pas l'intérêt d'adapter le concept de burn-out, je trouve même cela dangereux." Un avis que ne partage pas le psychiatre et psychothérapeute Christophe Bagot. Ce spécialiste du stress et des troubles anxieux se fait ici la voix de ceux qui refusent que l'expression "burn-out" soit étendue aux bacheliers. Pourquoi ? "C'est simple, nous n'avons déjà pas assez de critères permettant de reconnaître le concept de burn-out adulte sur le plan scientifique et épidémiologique. Du coup, je ne vois pas comment on pourrait adapter un concept de base discuté !"
Pour le psychiatre, "le burn-out est lié à notre histoire économique mondiale. Le fait que la notion de burn-out soit apparue récemment n'est pas un hasard. C'est parce que nous sommes dans un monde où la production est boostée et où il y a par conséquent une hyper-implication de plus en plus fréquente des travailleurs. Le problème avec l'élargissement du concept, c'est que le bachelier ne connait pas une situation professionnelle comparable à celle de l'employé car il n'est pas rémunéré. De plus, il n'y a pas la même exigence de rendement et de résultats. Même s'il peut y avoir une surcharge scolaire, ce n'est pas un burn-out à mon sens."
Selon Christophe Bagot, il faut également garder en mémoire que l'état dépressif du bachelier est souvent dû en grande partie à la pression parentale. Le docteur conclut : "Comparer le burn-out et le stress du bac, c'est diluer le concept du burn-out. Pour moi, cela est dangereux car c'est presque dédouaner la responsabilité du cadre professionnel et de certains employeurs dans le burn-out."
Les spécialistes s'accordent en revanche sur un point : il est nécessaire de prendre en charge les lycéens souffrant de maux d'anxiété, quelle que soit leur appellation. Finalement, le débat sur le burn-out ne serait peut-être qu'une question d'étymologie.
La question de la reconnaissance du burn-out
A ce jour, le burn-out, question très chère à l'ancien candidat socialiste à la présidentielle Benoît Hamon n'est pas reconnu comme une maladie professionnelle. Ainsi, les salariés en étant victimes ne sont pas indemnisés pour ce motif.
Cependant, cela pourrait évoluer. En effet, depuis février, le sujet est à nouveau sur la table à l'initiative d'un groupe de députés ayant planché durant presque un an sur l'épuisement professionnel. Ce dernier, constitué sur les directives de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, a rendu un rapport au titre évocateur : "l'épuisement professionnel ou burn-out, une réalité en manque de reconnaissance."
De plus en plus présent dans le débat public, le burn-out fait aussi l'objet de recommandations de certaines organisations sanitaires mondiales. Lundi, la Haute Autorité de Santé (HAS) a ainsi publié une série de recommandations destinées aux médecins et visant à améliorer le diagnostic et la prise en charge des patients.
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