La vidéo ne dure que 50 secondes mais suffit à faire comprendre le désespoir des migrants à Calais. Comment tenter de rejoindre l'Angleterre quand on trouve devant soi police, grillages et barbelés ? Un film, publié fin juillet dans les médias britanniques, montre un groupe de migrants escaladant une grille, dans l'espoir fou de se rapprocher encore un peu plus du tunnel.
Au milieu des adultes, on aperçoit une petite fille habillée d'un collant rose, la tête couverte par une capuche jaune. Tirée par les vêtements, elle est hissée au-dessus d'une clôture. Revenue sur le sol, de l'autre côté de la barrière, on la voit attendre que chacun de ses compagnons d'infortune parvienne à franchir le grillage.
Pleine de vie malgré le drame. Cette petite fille, Europe 1 l'a retrouvée. Elle s'appelle Isra, elle n'a que trois ans. L'enfant se trouve toujours dans la jungle de Calais et vit dans un abri de fortune. Du parcours d'Isra, on sait qu'elle est arrivée à Calais début juillet avec sa mère et sa petite soeur, âgée de dix mois.
Son périple — l'Erythrée, le Soudan, la Méditerranée, les Alpes et enfin Calais — n'a pas affecté sa bonne humeur. Souriante et pleine de vie, ses petits cris au micro d'Europe 1, la voix haut perchée, ne semblent pas témoigner du drame qu'elle traverse.
Rejoindre le père en Angleterre. La petite famille n'a qu'une obsession : retrouver le papa, de l'autre côté de la Manche. Tous les soirs, malgré le danger, la mère d'Isra confie son enfant à des amis erythréens qui tentent avec elle de traverser le tunnel en prenant tous les risques.
"L'important aujourd'hui, c'est qu'Isra rejoigne son père à Londres. Il est parti alors qu'elle n'avait qu'un an. Il faut vraiment qu'elle aille en Angleterre", explique la maman de la petite fille.
La peur du pouvoir erythréen. Devant la vidéo de sa petite fille portée au-dessus des grillages, le visage de la mère d'Isra se crispe de peur. Face au retentissement mondial de ces images, elle craint la vengeance du pouvoir erythréen sur sa famille. "Toute ma famille habite encore en Erythrée : si les autorités reconnaissent ma fille, ils vont leur réclamer beaucoup d'argent", dit-elle.
Une menace que la petite fille ne perçoit pas. À l'heure de quitter son abri de fortune, nous l'apercevons bondissante, enfilant son manteau à capuche. "Ce soir j'en suis sûre, le train va me conduire à papa", confie-t-elle à sa mère.