Pour Cédric Herrou, c'est une petite victoire, mais une victoire quand même. L'agriculteur de 38 ans, devenu la figure de proue de la cause des réfugiés à la frontière franco-italienne, a vu son contrôle judiciaire largement allégé, vendredi, par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence. "La justice a pris conscience du harcèlement à mon encontre", réagit il sur Europe 1.
"On avance un peu". Cela faisait un an que Cédric Herrou était soumis à ce contrôle judiciaire. Depuis le 23 juillet 2017, précisément, date à laquelle il avait été arrêté en gare de Cannes avec des demandeurs d'asile. Neuf gardes à vue et deux procédures judiciaires plus tard, il s'avoue donc "soulagé". "On voit qu'on avance un peu, qu'on n'est pas face à un mur. Bon, c'est peut-être un mur, mais un mur qui bouge", glisse l'agriculteur.
Autorisé à traverser les frontières. Concrètement, celui à qui l'on doit l'entrée du "principe de fraternité" dans le droit français, a toujours l'obligation de se présenter tous les quinze jours à la gendarmerie. En revanche, il récupère son passeport, peut quitter le territoire national en informant, par fax ou courrier, le juge d'instruction et peut librement fréquenter les gares et parvis. Quant à l'Italie, il peut s'y rendre, mais "uniquement pour raisons professionnelles".
Délibéré CJ. Pointer tous les 15 jours. Je récupère mon passeport, peux quitter le territoire national en informant le juge d'instruction et peux librement fréquenter les gares et leurs parvis. Pour l'Italie, peux m'y rendre mais uniquement pour raisons professionnelles
— Cédric Herrou (@CedricHerrou) 10 août 2018
"Je vais pouvoir travailler dans de meilleures conditions". "Étant donné que la vallée de la Roya est une vallée franco-italienne, j'ai donc le droit de passer par Vintimille (en Italie, ndlr) pour rejoindre Nice, qui est l'axe le plus direct", précise-t-il sur Europe 1. "Mon exploitation agricole a été mise à défaut par ce contrôle judiciaire. Là, je vais pouvoir travailler dans de meilleures conditions et bien sûr pouvoir débattre dans des pays en Europe dans lesquels je suis invité", se réjouit-il enfin, quelques semaines seulement après la décision du Conseil constitutionnel actant qu'une aide désintéressée au "séjour irrégulier" des étrangers ne saurait être passible de poursuites.
"Ça fait toujours plaisir, ça remonte le moral. On se bat beaucoup pour avoir des petites bonnes nouvelles comme ça. Et on y arrive petit à petit. C'est pour ça qu'il faut garder confiance et avancer", poursuit Cédric Herrou.
"La vallée de la Roya, ça va mal". Car son combat est encore loin d'être gagné. "La vallée de la Roya, ça va mal. Il y a une gestion qui est catastrophique, il y a des gens sont en danger", expose le militant. "Il y a une surmilitarisation, une dépense assez énorme… Il y a quand même 40 gendarmes mobiles autour de ma propriété, ce qui coûte au moins 40.000 euros par jour pour surveiller une ferme. Pourquoi faire ?", s'érige-t-il, alors qu'il a déjà déclaré son intention de porter plainte. Et l'agriculteur de conclure, dans un nouvel appel à la prise de conscience : "Pour l'instant, il n'y a que des associatifs et des militants qui prennent ce problème migratoire à bras le corps. On ne peut pas trop compter sur nos politiques..."