Céline raconte à Olivier Delacroix, sur Europe 1, comment, lorsqu'elle était adolescente, elle a fini par céder aux avances répétées d'un ancien professeur à qui elle avait pourtant refusé son consentement.
Céline, 49 ans, a été contrainte alors qu'elle était encore adolescente à une relation sexuelle par un ancien professeur. Au cours d'une soirée alcoolisée, elle a fini par céder aux avances répétées de cet homme plus âgé, après lui avoir pourtant dit "non" à plusieurs reprises. Sans le savoir, Céline s'est retrouvée prise au piège de ce que l'on appelle la "zone grise" du consentement, dans laquelle l'insistance de l'agresseur et la gêne qu'il provoque chez sa victime finissent par faire plier cette dernière. Au micro d'Olivier Delacroix, sur Europe 1, Céline raconte cette relation sexuelle forcée, qu'elle a mis du temps à appeler "un viol".
"Pendant les cours, il était toujours très amical. Il faisait de l'humour, il était toujours en train de me charrier, mais pas que moi. On était dans une école où il y avait beaucoup de filles. J'avais 16 ans et lui avait un peu plus du double, 35 ou 36 ans.
Un jour, je l'ai croisé en ville. Il était avec sa copine. Je lui ai juste dit 'Bonjour, ça va ?', et chacun a passé son chemin. La semaine d'après, il m'a dit : 'Je voulais te dire, ma copine a été jalouse de toi quand on t'a croisée'. Ça m'a laissé très perplexe. Je me suis dit : 'Comment peut-elle être jalouse de moi ? Elle ne me connaît pas'. J'étais complètement flattée […], flattée de son intérêt pour moi. Il était charmant, jeune, mignon.
>> De 15h à 16h, partagez vos expériences de vie avec Olivier Delacroix sur Europe 1. Retrouvez le replay de l'émission ici
Quelques semaines plus tard, lors d'une soirée, Céline finit avec une autre amie chez ce professeur.
À ce moment-là, il n'était plus mon prof depuis trois ou quatre mois. J'étais avec une copine qui le connaissait, on buvait des verres. […] Et puis on en est arrivé toutes les deux à ce truc : 'Viens, on va voir Marc !' Je ne sais pas si on a téléphoné avant, mais on est allé chez lui. On avait déjà bu avant, et chez lui, on a bu de plus belle, écouté de la musique.
Sur le moment, je ne trouvais pas la situation anormale. Je trouvais ça rigolo, même si je me rendais compte que ce n'était pas commun de se retrouver chez son prof. Je l'aimais bien, j'aimais bien parler avec, il était intéressant. […] Mais, dans mon esprit, il n'y avait rien d'autre que ça, il ne m'attirait vraiment pas.
La soirée avance, et Céline échange un baiser avec son ancien prof.
Ça m'a amusé, comme à l'adolescence où les premières personnes que j'ai embrassées étaient des copines. On s'amusait à tester. Dans mon souvenir, j'étais dans le même état d'esprit. Je trouvais ça rigolo. Pas une seconde je me suis dit que ça pouvait dégénérer, vraiment pas.
J'ai décidé de dormir chez lui. Je crois que ma copine était partie. Certains de mes souvenirs sont très clairs, d'autres très vagues. Je pense qu'il m'a proposé [de dormir chez lui], et j'ai dit 'Okay, c'est plus simple'. […] Inconsciemment, je pensais qu'il était correct, qu'il n'allait rien tenter. Je ne me suis même pas posé la question. Il avait le double de mon âge !
Il en vient à faire des avances à Céline, qui refuse à plusieurs reprises. Son hôte insiste, lourdement…
Au bout d'un moment, je me suis dit : 'Vas-y ! Fais ton truc et laisse-moi dormir'. C'était vraiment ça : 'J'ai envie que tu me foutes la paix. J'en ai marre que tu insistes, que tu me demandes, j'ai ai marre de dire 'non'". J'avais envie de dormir. J'étais saoule, il devait être 3 heures du matin. […]
Il a pas mal insisté, parce que je me vois lui dire 'non', 'non', 'non'… et puis je vois le moment où j'en ai marre et où je le laisse faire.
[…]
Je pense que si je m'étais levée et que j'étais sortie, il ne m'aurait pas retenue. C'est l'impression que j'ai. Il ne m'aurait pas empêchée de sortir […] En y réfléchissant après, je me suis rendue compte que j'aurais pu partir. Mais, dans ma tête, je n'osais pas aller chez mon copain parce qu'il était tard, parce que j'étais complètement ivre, parce que j'avais embrassé ce gars et que je n'aurais pas dû.
Céline a mis des années avant de pouvoir mettre des mots sur ce qui lui est arrivé, et de comprendre qu'elle s'était retrouvée dans cette "zone grise" du consentement, faisant de ce qu'elle a subi un viol. Longtemps, le sentiment qui a dominé chez elle a été celui de la culpabilité.
J'avais un copain. C'est ce qui a été très difficile à vivre pour moi. Ce qui s'est passé cette nuit-là, dans mon esprit, c'était : 'Je l'ai trompé, c'est fini avec lui', alors que j'en étais très, très amoureuse. Ça m'a mis dans un état ou je n'étais plus capable de réfléchir.
[…]
Ça ne fait pas longtemps que je suis convaincue que c'était un viol, grâce à #Metoo et tout ce qui s'est passé : lire des témoignages, en entendre parler, le fait que je me vois lui dire 'non' plusieurs fois. Je me dis que je n'ai pas consenti, même si j'ai fini par lui céder. Je n'ai pas cédé parce que d'un coup, j'en avais envie, mais vraiment parce que j'en avais marre."