Un enfant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté en France, un seuil établi à 1.700 euros par mois pour une famille avec deux enfants. Emmanuel Macron doit lancer ce mardi une grande concertation, axée sur la pauvreté des enfants et des jeunes. Il recevra les associations comme le 115 et la fondation Abbé Pierre mardi midi pour leur détailler son plan de lutte contre la pauvreté. Notre reporter a pris l'ampleur de la situation.
Un réseau d'aide d'urgence saturé. Parmi les personnes pauvres, environ 150.000 sont à la rue en France, dont 30.000 enfants. La moitié des appels au 115, le numéro d'urgence, provient d'une famille en recherche d'un hébergement d'urgence. En réalité, moins d'une personne sur deux qui appelle le 115 se voit proposer une solution : en centre d’hébergement ou en hôtel quand les centres sont pleins. Le réseau est complètement saturé.
Des dépenses de logement au détriment de la santé. Ce qui inquiète Christophe Robert de la fondation Abbé Pierre, c'est ce que peut engendrer cette pauvreté, ce mal logement, sur les enfants : "Ça peut avoir des impacts sur la manière de se soigner. On va par exemple tout dépenser dans un pauvre logement pourri mais parce qu’on se dit 'il faut que je le garde, autrement je vais être expulsé, je vais être à la rue', ce sont des arbitrage financiers au détriment de ces autres dépenses : alimentation, loisir, santé, culture. Donc des impacts qui sont considérables et appellent vraiment à un sursaut de l’action publique dans son ensemble", souligne ce bénévole.
La situation est d'autant plus urgente qu'elle s'aggrave : le taux d’enfants vivant sous le seuil de pauvreté est passé de 16 à 20% en 15 ans. Il y en a aujourd’hui trois millions en France.
Le témoignage de Victoire, 13 ans, à la rue pendant deux ans
Avec sa mère et ses deux petits frères, pendant deux ans, l'adolescente a écumé les centres d'hébergements et les hôtels. La famille vient juste de trouver un logement pour quelques mois seulement, avec l'aide du 115.
"J'étais fatiguée, je me faisais mes devoirs en retard. Il y avait des rongeurs. On n’arrivait pas à dormir. Pour une fois, je peux dire que ça me manquait l’école parce que je faisais rien dans la journée. Même mes amis proches, je ne leur explique pas trop ma vie de tous les jours ; ce qui s’est passé dans ma vie. C’est pas que j’ai honte mais j’ose pas dire 'ouais moi j’habite dans un centre' ou des trucs comme ça. C’est gênant. Quand on voit des amis à l'école qui ont des vêtements et qu'on regarde les sommes, moi je ne pourrais pas. On est triste mais j'essaye de ne pas penser à ça."
"Ça tracasse un peu, ça travaille l’esprit parce qu’on se dit 'bah, comment on va s’en sortir après ?'. Ça énerve. On a peut-être vécu des choses, mais je me dis que peut-être le lendemain ce sera plus facile. Et qu’on s’en sortira un jour ou l’autre. je veux être avocate, pour avoir une vie, en gros."