Fin avril, Marilyne G. a eu la désagréable surprise de voir son violeur revenir s’installer à 150 mètres de son domicile, dans le village de Croissy-Beaubourg, en Seine-et-Marne. Libéré sous bracelet électronique, ce récidiviste avait pourtant l'interdiction d’entrer en contact avec elle ou de fréquenter les écoles de ses enfants. Cette affaire que révélait Europe 1, mardi matin, pose la question de la mise en œuvre de l’éloignement géographique. Céline Parisot, ancienne juge d’application des peines et secrétaire générale de l’Union syndicale des magistrats (USM), a répondu aux questions d’Europe 1.
• Comment un violeur peut-il revenir vivre à proximité de sa victime ? Cette situation est possible "à partir du moment où tous les critères prévus par la loi sont pris en compte", affirme la magistrate. Le juge d’application des peines (JAP) "regarde toute la situation, pas seulement celle de la victime, et rend sa décision au vu de l’ensemble des éléments : la gravité des faits commis, la réinsertion possible de la personne condamnée, car c’est cela le critère premier", poursuit Céline Parisot, précisant que « c’est la réinsertion qui contribue à éviter la récidive".
• Existe-t-il une loi pour imposer un périmètre de sécurité autour des victimes ? Non, aucun périmètre de sécurité n’est prévu par la législation française. En revanche, "on prend en compte un certain nombre d’éléments notamment l’avis de la victime", explique la secrétaire générale de l'USM afin que celle-ci puisse faire savoir si cela la dérange car "les faits peuvent avoir été commis 20 ans ou un an avant, et ce sont déjà deux choses complètement différentes".
• Dans quelle mesure l’avis de la victime est-il pris en compte ? Toutefois, cet avis n’est que consultatif. Elément parmi d’autres, il peut donc ne pas être suivi. "Ce n’est pas la victime qui prend la décision d’aménagement de la peine", insiste la magistrate rappelant que la justice n’est pas affaire de "justice privée".
• Dans quel cas est prévu l’éloignement géographique ? Cette mesure peut être mise en place mais sous certaines conditions - comme dans le cas des maris violents. Elle n’est pas systématique. Pour les infractions sexuelles les plus graves – dont le viol ne fait pas partie – comme les viols aggravés, les viols avec torture ou acte de barbarie, ou les assassinats d’enfants : "Dans tous ces cas-là, il y a une obligation d’éloigner l’auteur de la victime", précise-t-elle.
Mais à l’exception des infractions susmentionnées, "il n’y a pas d’automaticité" d’application de la mesure d’éloignement géographique, indique la secrétaire générale de l’USM. Concrètement, un condamné peut donc légalement rentrer à son domicile, même si celui-ci se situe non loin du lieu de vie de sa victime. Même si rappelle Céline Parisot, la procédure se doit "de prendre en compte les intérêts de la victime". Au juge d’application des peines de se charger de peser les intérêts de la victime tout comme ceux de la réinsertion du condamné.