Pour certaines familles, le sujet est des plus délicats. Mais les enfants grandissent et vont forcément, d'une manière ou d'une autre, découvrir le mystérieux monde de la sexualité. À l'aube de cette exploration, les parents peuvent alors avoir un rôle à jouer auprès de leur fils ou de leur fille. Mais comment leur parler préservatif, pilule ou stérilet ? À l'occasion de la Journée mondiale de la contraception, Europe 1 a posé la question à deux spécialistes.
C'est aux parents d'aborder (en douceur) le sujet
Parler de sexualité avec ses enfants n'est jamais chose aisée, il est vrai. D'abord parce que le sujet relève de l'intime. Ensuite parce qu'à la puberté, les jeunes ados ont tendance à prendre leurs distances avec papa-maman. "Souvent, ils n'ont pas trop envie d'en parler avec des adultes", appuie ainsi Patricia Mozdzan, psychologue clinicienne et psychanalyste, qui reçoit régulièrement dans son cabinet parents et adolescents.
C'est donc surtout à l'école, via leurs camarades, ou par leurs lectures, la télévision ou Internet qu'ils sont le plus souvent renseignés.
Mais si l'adolescent parvient à mettre ses considérations de côté et commence à poser des questions à la maison, il est alors important de lui offrir des réponses. Dans le meilleur des cas, c'est toutefois aux parents d'aborder le sujet, souligne la spécialiste. Et d'inciter au maximum au dialogue.
À quel âge faut-il commencer à en parler ?
En France, l’âge médian du premier rapport sexuel est de 17,4 ans pour les garçons et de 17,6 ans pour les filles, selon une enquête de l'Institut national d'études démographiques (Ined). Reste que la fameuse question : "comment fait-on les bébés ?" intervient dès l'âge de 5-6 ans. À celle-ci, il n'est évidemment pas question de répondre en agitant une boîte de préservatif ou de pilule contraceptive.
"Il vaut mieux commencer à parler de contraception vers 11 ans, peu avant l'âge des premières règles. D'abord, on peut présenter à sa fille une boîte de serviettes ou de tampons en lui disant : 'tu choisiras'. Ensuite, la mère de famille peut l'emmener voir un gynécologue - différent du sien -, puisque la vaccination contre le papillomavirus (HPV) est recommandée dès l'âge de 11 ans", souligne Patricia Mozdzan.
" À l'entrée en sixième, tout le monde doit être un minimum informé "
"Cela peut-être une bonne occasion d'en parler", valide Capucine Dubois, écoutante-rédactrice sur le site de prévention Fil Santé Jeunes. "On peut aussi l'aborder en amont de manière simple, en expliquant qu'on peut choisir de ne pas avoir d'enfants par exemple et que plusieurs outils existent, avant de rentrer dans un aspect un peu plus pratique dès que la puberté arrive".
"À l'entrée en sixième, tout le monde doit être un minimum informé", résume la psychologue Patricia Mozdzan. À ce moment-là, le pré-adolescent, n'envisageant pas une vie sexuelle immédiate, est moins impliqué émotionnellement et sans doute plus ouvert à l'écoute. Plus les bases sont jetées rapidement, plus le dialogue sera donc facile par la suite.
Garder le sourire et ne pas dramatiser
Et pour cela, le meilleur moyen reste avant tout de garder le sourire. La spécialiste conseille ainsi de choisir un moment où l'ambiance est un peu détendue, pendant les vacances par exemple, pour mettre le sujet sur la table. "On peut notamment mettre des préservatifs à disposition des garçons, à partir de 11-12 ans, pour qu'ils s'amusent avec, que ce soit comme un jouet", conseille Patricia Mozdzan. "Tout ça doit être léger, naturel. Il faut éviter les cours magistraux et les 'il faut qu'on en parle'. Plus simple ce sera, mieux ce sera".
Un film à la télévision ou un reportage à la radio peut aussi être une occasion d'évoquer de façon générale le préservatif ou la pilule du lendemain. Plusieurs livres peuvent aussi permettre d'aborder le sujet, comme le célébrissime Guide du zizi sexuel, à destination des 9-13 ans. "On peut l'acheter à ses enfants, leur dire de le lire quand ils en ont envie, en leur ajoutant 'si tu as des questions, tu y trouveras peut-être des réponses", préconise la psychologue.
Une autre manière d'aborder la contraception peut être de "demander à son enfant si un cours d'éducation à la sexualité est prévu à l'école", complète Capucine Dubois. "Plusieurs sites internet, parmi lesquels Fil Santé Jeunes, mais aussi Onsexprime, peuvent aussi être de bons conseils. 'Va voir, il y a peut-être des choses qui peuvent t'intéresser pour toi ou tes copains'", propose de lancer à son enfant l'écoutante du numéro anonyme et gratuit, qui insiste à ce propos : "En parler, ce n'est pas inciter à avoir une relation tout de suite".
Accompagner oui, dicter non
Attention toutefois à ne pas se montrer trop intrusif ou curieux, précisent les deux expertes. Il peut d'ailleurs s'agir simplement d'accompagner ses ouailles à trouver des réponses à l'extérieur de la famille, notamment auprès des centres de planification, où les jeunes peuvent venir parler sexualité, risques de grossesse et infections sexuellement transmissibles. Un médecin ou une infirmière scolaire peuvent aussi faire office de relais.
Et Capucine Dubois de rappeler à ce propos que "tous les parents ne sont pas forcément très renseignés sur les moyens de contraception existants". Parfois, il peut en effet s'avérer utile de poser des questions avant de répondre à celles de ses enfants.