"Aujourd’hui, quand on a une couleur de peau qui n’est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé" par les forces de l'ordre en France. La phrase a été prononcée par Emmanuel Macron, interrogé début décembre sur les contrôles au faciès lors d'une interview au média Brut. Deux mois plus tard, l'épineuse question est au menu du Beauvau de la sécurité, qui commence officiellement lundi, avec une première table ronde sur les relations entre la police et la population, réunissant des représentants de la police et de la gendarmerie, des parlementaires et des maires. Europe 1 s'est rendue dans une cité du XXème arrondissement de Paris, où des changements sont espérés.
"On a tellement grandi avec ça"
"Le contrôle au faciès ? Oui, ça nous parle grave", répondent Lamine et ses amis, qui fument assis devant une boulangerie. Les jeunes hommes décrivent une pratique qui fait partie de leur quotidien. "C’est automatique. On a tellement grandi avec ça… Des fois, on va être en voiture et deux noirs, on sait qu’ils vont forcément bloquer sur nous, alors qu’on a rien à se reprocher !"
"Ça, c’est dérangeant", renchérit un autre. "Ça veut dire que si j’ai un survêtement, automatiquement je vais être mis dans une catégorie, dans un sac." Or, ce sentiment de stigmatisation renforce selon eux le repli communautaire. "On est traité comme de la merde, et bien on va rester entre merdes et puis salut les autres."
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"Mais ils ne sont pas tous pareils", nuance toutefois un jeune homme. "Ce qui est dommage en fait, c’est ce rapport qu’on a avec eux, toujours le rapport de force. On veut juste que l’approche change." Un peu plus de respect suffirait, disent-ils, à améliorer leurs relations.
Plus d'actions de pédagogie dans les établissements scolaires ?
"Il y a une réalité de terrain qui fait qu'on peut être amené à contrôler les mêmes personnes plusieurs fois", explique de son côté à Europe 1 Jérôme Gimenez, jeune délégué UNSA, et qui a lui-même travaillé dans cette cité. Le policier se souvient d'une bande de jeunes, contrôlés plusieurs jours de suite pour des nuisances sonores. "On les a verbalisés, on les a évincés, mais ils reviennent et ils continuent d’empêcher les habitants du quartier de se reposer. Donc c’est compliqué."
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"Ce n'est pas parce que vous êtes un groupe de jeunes plutôt 'capuchés' que vous vous faites contrôler. C’est parce que votre attitude correspond à des signalements", affirme donc le délégué syndical, proposant de généraliser les caméras-piéton pour les policiers et d'organiser plus d’actions de pédagogie et de proximité dans les établissements scolaires.
Des ONG menacent de saisir la justice
Quelles que soient les solutions envisagées, le temps presse : à l'occasion de l'ouverture du Beauvau de la sécurité, un collectif d’ONG, dont Amnesty International et Human Rights Watch, ont lancé conjointement une procédure de mise en demeure contre l’Etat pour qu’il mette un terme aux "contrôles d’identité discriminatoires". Cette action légale contraint le gouvernement à agir dans les 4 mois à venir. Si rien n’est fait, les ONG saisiront la justice.