Dix personnes venues des rangs de l'ultra-droite ont été placées en garde à vue ce week-end, après un large coup de filet anti-terroriste, mené par différents services du renseignement intérieur en Corse, en région parisienne, mais aussi à Vienne et en Charente-Maritime. Ils sont suspectés d'avoir voulu s'en prendre à des cibles musulmanes, et appartiennent tous à un groupuscule baptisé Action des Forces Opérationnelles (AFO).
Face au risque d'"une guerre civile". "On a présenté ça comme le tout-venant. Non. Ce sont des gens qui étaient d'abord dans un premier groupe - Les Volontaires pour la France - né au lendemain des attentats pour pallier les insuffisances supposées de l'Etat en cas de guerre civile face à la menace djihadiste", explique au micro d'Europe Midi Matthieu Suc, journaliste à Mediapart et auteur d’une enquête sur cette cellule d’extrême-droite. Ce groupe s'est d'abord constitué une existence légale en se déclarant comme association. Mais "certains ont trouvé que ça n'allait pas assez loin et qu'il fallait passer à des actions violentes et concrètes", indique le journaliste. "À l'automne 2017, ils ont fondé ce groupe totalement clandestin : Action des Forces Opérationnelles".
Des projets "pas très clairs". Parmi les recrues : "des militaires, des gendarmes, des policiers ou des 'ex' de ces différents corps", mais aussi des membres du monde médical, énumère Matthieu Suc. "Les projets n'étaient pas très clairs. Comme dans plein de groupes terroristes, on fait des réunions secrètes, et on parle d'éventuelles personnes condamnées pour association de malfaiteurs terroristes qui allaient sortir de détention et qu'il fallait tuer, on parle d'imam classés comme radicaux..."
Un laboratoire d'explosifs. C'est finalement la menace d'un passage à l'acte imminent qui aurait poussé les enquêteurs à intervenir. "Il y a eu un accélérateur ces derniers jours parce que […] la DGSI a découvert que l'un des hommes interpellés s'était constitué un laboratoire de fabrication d'explosifs". Les enquêteurs devront encore déterminer le niveau d'avancement et de maturité d'un éventuel projet terroriste.
Gardes à vue toujours en cours. Les dix interpellés, neuf hommes et une femme, toujours soumis lundi à une garde à vue qui peut durer 96 heures en matière terroriste, avaient "un projet de passage à l'acte violent, aux contours mal définis à ce stade, ciblant des personnes de confession musulmane", a précisé une source proche de l'enquête à l'AFP. Ils ont de 32 à 69 ans. Selon TF1-LCI, ils ciblaient des imams radicaux, des détenus islamistes sortant de prison mais aussi des femmes voilées choisies au hasard dans la rue.
Parmi eux figure le chef de file présumé de ce réseau, Guy S., né en 1953, retraité de la police nationale vivant à Tonnay-Charente. Selon la mairie de cette commune de Charente-Maritime, il avait été assesseur pour le Front national (FN) d'un bureau de vote aux élections présidentielle et législatives de 2017. Cependant, selon Albert Maes, secrétaire départemental aux adhésions du FN, il ne figure pas dans le fichier des adhérents, ni même dans celui des "sympathisants".