Un groupe de travail parlementaire propose de créer une nouvelle infraction, "l'outrage sexiste et sexuel", pour punir toute une série de comportements dont sont en particulier victimes les femmes dans les lieux publics, comme la rue et les transports.
Une zone grise. Dans un rapport commandé par la secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, et remis mercredi au gouvernement, ces cinq députés constatent que "toute une zone grise relevant du harcèlement de rue" donne lieu à peu ou pas de poursuites.
"Créer un interdit clair". Il existe certes déjà un arsenal juridique susceptible de sanctionner ce type de comportement, écrivent Sophie Auconie (UDI), Laetitia Avia (LaRem), Erwan Balanant (MoDem), Elise Fajgeles (LaRem) et Marietta Karamanli (Nouvelle gauche) dans ce document. Mais "face à son inapplication, il est nécessaire de simplifier la poursuite des auteurs et de créer un interdit clair", ajoutent ces parlementaires, qui proposent de dépasser le "harcèlement de rue" pour englober tout l'espace public.
"Quand on drague de manière lourde et insistante, quand on suit une fille, quand on l'embête, quand on la siffle… Ça se reconnaît. Ce sont des comportements qui mettent les femmes mal à l'aise. Elles se sentent humiliées, ou pas légitimes dans l'espace public, et sont obligées d'adopter des stratégies d'évitement", dénonce Elise Fajgeles au micro d'Europe 1.
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Le harcèlement de rue puni d'une amende forfaitaire. Le groupe de travail propose ainsi de créer l'incrimination d'"outrage sexiste et sexuel" visant gestes et propos déplacés, humiliants ou dégradants, sifflements, remarques obscènes, le fait de suivre quelqu'un contre son gré, etc. En somme, tout comportement portant atteinte à la dignité des victimes en raison de leur sexe ou de leur orientation sexuelle ou créant une situation intimidante ou angoissante.
Une amende de 90 à 350 euros. Cette incrimination a l'avantage à ses yeux de poser un interdit social, de reconnaître un statut de victime aux femmes subissant ces comportements, de lutter contre le sentiment d'insécurité qu'ils peuvent engendrer et de limiter le passage à des actes plus graves. Elle serait punie d'une contravention de quatrième classe, qui ne nécessite pas le dépôt d'une plainte, permet l'émission immédiate d'un procès verbal et un recouvrement instantané sous forme d'une amende forfaitaire de 90 euros, qui monterait à 200 euros pour un paiement sous 15 jours et 350 euros au-delà.
Des circonstances aggravantes. Abuser de l'autorité conférée par une fonction, agir en groupe ou dans un transport collectif, serait une circonstance aggravante, exposant à une contravention de cinquième classe passible du tribunal de police : il ne pourra plus alors y avoir de forfait et l'amende pourra être plus élevée.
23 mesures concrètes. Le rapport juge en outre nécessaire de prévoir des peines complémentaires, tel un stage pour faire prendre conscience aux contrevenants de la nocivité de leur comportement. Au total, le groupe de travail propose 23 mesures, qui vont de l'équipement des policiers en terminaux numériques adaptés au développement d'une application permettant aux victimes de déclencher l'enregistrement de l'infraction, en passant par un meilleur traitement des mains courantes et dépôts de plainte ou la généralisation des caméras dans les transports collectifs.
Faire de la pédagogie. Il propose également des actions de sensibilisation en milieu scolaire ou par de l'affichage public et des campagnes de communication dans les transports, et prône une mobilisation des acteurs du secteur publicitaire contre les stéréotypes sexistes. Il estime enfin que le "cyber-outrage" doit également faire l'objet de "davantage de réflexion".