Doublement des maisons de santé, développement de la télémédecine, délégation de tâches entre professionnels... Le gouvernement a présenté vendredi son plan de lutte contre les déserts médicaux, un problème rencontré par des millions de Français confrontés à la pénurie grandissante de médecins. "L'accès aux soins est au cœur du pacte social", a déclaré le Premier ministre. Le gouvernement mise sur la "confiance" aux professionnels de santé, les initiatives locales et la "simplification administrative".
De moins en moins de généralistes. La France n'a jamais compté autant de médecins (plus de 215.000 en 2015) mais la profession, vieillissante et mal répartie, peine à se renouveler, en particulier chez les généralistes libéraux. Tout le pays est concerné, et pas seulement les campagnes, selon l'Ordre des médecins, qui prédisait l'année dernière un quart de généralistes en moins en 2025 par rapport à 2007.
Deux fois plus de maisons de santé. La pénurie laisse les élus "impuissants" voire "désespérés", selon Isabelle Maincion, co-présidente de la commission santé de l'Association des maires de France. Nombre d'élus réclament des mesures contraignantes, mais la ministre a déjà fait savoir qu'elle ne toucherait pas à libre installation, rappelle Isabelle Maincion, favorable à plus de "souplesse" dans la labellisation des maisons de santé pluri-professionnelles. Conformément à une promesse du candidat Macron, le gouvernement entend doubler le nombre de ces structures (910 en mars 2017) et développer les centres de santé (où travaillent des salariés), en leur consacrant 400 millions d'euros sur le quinquennat.
Dépasser "les cloisonnements".Déploiement de la télémédecine, possibilité pour les professionnels hospitaliers ou libéraux d'aller "donner du temps médical dans les zones désertifiées" ou encore "pratiques avancées entre professionnels" (infirmiers réalisant des actes médicaux par exemple) sont également au programme. La ministre veut favoriser la "coopération" entre professionnels et entre la ville et l'hôpital, dépasser "les cloisonnements institutionnels" et accélérer "l'innovation organisationnelle" grâce à un fonds dédié.
Une stratégie saluée par le chirurgien Guy Vallancien, membre de l'Académie nationale de médecine pour qui la "moitié des actes médicaux pourraient être délégués", comme la vaccination, actuellement expérimentée par les pharmaciens, ou l'"établissement de certificats d'aptitude au sport". Un "chantier difficile" parce qu'il heurte "la tradition des médecins responsables de tout", reconnaît-il.
Développer la télémédecine. Le développement de la télémédecine passera lui par des négociations entre l'Assurance maladie et les médecins début 2018 pour en fixer les tarifs. Un matériel de téléconsultation est également promis à tous les Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) d'ici 2020.
Le numerus clausus reconduit. La suppression du numerus clausus (nombre d'étudiants admis en seconde année de médecine, récemment relevé par le précédent gouvernement), en revanche, n'est pas à l'ordre du jour, à la satisfaction des syndicats d'internes, qui la jugent inefficace pour lutter contre les déserts médicaux. En plus des incitations financières, l'"accompagnement" est en outre indispensable pour attirer les praticiens dans les zones en besoin, "en aidant par exemple leurs conjoints à trouver du travail" ou "des places en crèche", fait-il valoir. Isolement, horaires à rallonge... Les conditions d'exercice de leurs aînés ne séduisent plus les jeunes, à la différence du salariat ou de l'exercice en groupe.