Des pressions pour qu'ils se rasent, des allusions à leur religion, l'islam, et pour finir un licenciement : deux anciens agents de sécurité de l'aéroport d'Orly reprochent à leur ex-employeur, Securitas, de les avoir mis à la porte à cause de leurs barbes.
Non-respect du "référentiel vestimentaire". Lors d'une rencontre mercredi au cabinet de l'avocat Me Eric Moutet, Bachir, 28 ans, qui a demandé à ce que son identité complète ne soit pas publiée, assure que sa courte barbe noire lui valait "de petites piqûres de rappel" telles que: "Si vous voulez, je vous offre une tondeuse". Le 24 novembre, sa hiérarchie lui a refusé l'accès à son travail de contrôle des passagers avant embarquement. Un courrier lui reproche de n'avoir pas respecté le "référentiel vestimentaire", en l'occurrence "barbes, boucs ou moustaches courts, taillés, soignés et entretenus". Bachir, qui a porté plainte pour discrimination, a ensuite été licencié pour avoir enfreint ce règlement intérieur et pour d'autres motifs: "bavardage" et "retards et absences".
Chargé de surveiller ses collègues musulmans. Un autre ex-salarié de Securitas, Bechir, 34 ans, a lui été licencié en juin dernier, bien avant les attentats du 13 novembre, en raison d'une "inaptitude médicale" liée à une hernie discale. Ce père de trois enfants soupçonne son ancien employeur de l'avoir en réalité "poussé vers la sortie" à cause de sa barbe, et a décidé de l'attaquer aux prud'hommes, raconte-t-il mercredi. Chef d'équipe pour Securitas, il assure aussi qu'on lui avait demandé de "surveiller" les salariés musulmans, pour voir s'ils "faisaient la prière" pendant les pauses.
"Paranoïa" ou "consignes strictes" ? Pour leur avocat, il y a une "radicalisation de l'entreprise". "Certaines entreprises commencent à avoir un comportement problématique" en profitant de la "paranoïa" suscitée par les attentats, s'inquiète Me Moutet.
Mais l'entreprise a envoyé mercredi un mail collectif expliquant que "comme l'ensemble des entreprises de sécurité privée, elle (était) ciblée par l'infiltration de salariés radicalisés", et qu'elle avait mis en place des "consignes strictes", présentées aux partenaires sociaux le 20 novembre. Elle a rappelé "son attachement total au respect des différences, du multiculturalisme et des religions, ainsi qu'au respect du règlement intérieur en termes de tenues et d'apparence de ses agents de sécurité, en particulier quand ils sont face au public".