La conductrice du car scolaire impliquée dans la collision avec un train régional en décembre à Millas, dans les Pyrénées-Orientales, a maintenu sa version de la "barrière levée" lors de son audition mercredi à Théza, près de Perpignan, a indiqué son avocat. "Elle explique que les barrières étaient levées et que le feu ne fonctionnait pas", a déclaré Me Jean Codognès, à l'issue de l'audition, devant les deux juges d'instruction en charge de l'enquête sur l'accident qui a fait six morts.
Cette audition a eu lieu dans le centre de convalescence où la conductrice se trouve et non au tribunal de grande instance de Perpignan, comme prévu. Arrivés vers 11h, les deux juges marseillaises ont quitté Théza peu après 17h sans faire de commentaire. La conductrice, mise en examen pour "homicides et blessures involontaires par imprudence" le 20 décembre, n'avait jusque-là été entendue que succinctement en raison de son état de santé.
"Les visages des enfants la hantent". Selon l'avocat, cette audition de plusieurs heures avec des intermèdes a été "très compliquée" et réalisée "en présence d'un psychiatre". "Elle a répondu aux questions des magistrats de manière très complète", a-t-il souligné, constatant que sa cliente s'est "effondrée aux souvenirs des enfants du (car)". "C'est une épreuve de se souvenir du drame, des enfants. Les visages des enfants la hantent. Je ne sais pas si humainement on peut se reconstruire après une telle situation", s'est interrogé Me Codognès.
Selon l'avocat, il faut attendre le rapport d'expertise. Concernant l'enquête, l'avocat a affirmé que les témoignages n'étaient "pas concordants" et qu'on aurait une "idée plus précise" de ce qui "s'est passé après le rapport d'expertises". "Les expertises techniques qui ont été diligentées par les magistrats instructeurs ne sont pas encore rentrées", a-t-il précisé, félicitant les deux magistrats qui "mettent le paquet au niveau technique" pour connaître la vérité et ont nommé "des experts indépendants" de la SNCF. Par ailleurs, pour Me Codognès, qui a dit avoir reçu depuis le début de l'affaire "200 lettres de Français" ayant vu "des dysfonctionnements de passages à niveau", la "SNCF est un adversaire qui phagocyte tout". Et de constater au contraire que "l'instruction est un havre de vérité".
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Le feu rouge et la sonnerie d'alarme n'auraient pas fonctionné. Après sa mise en examen, la conductrice avait été hospitalisée en raison de sa "grande détresse" psychologique et de ses blessures physiques dues à l'accident. Cette mère de famille de 46 ans a affirmé depuis le premier jour que les barrières du passage à niveau étaient levées lors de la traversée de la voie par le car scolaire qu'elle conduisait. Elle assure également que le feu rouge du passage à niveau et la sonnerie d'alarme ne fonctionnaient pas.
Une enquête centrée sur le fonctionnement du passage à niveau. Le 14 décembre, la collision avec un TER à un passage à niveau à Millas, après la sortie des classes du collège, a fait six morts et plusieurs blessés parmi les 23 collégiens transportés. Cinq d'entre eux, dont le pronostic vital a été engagé, ont pu quitter les services de réanimation après les fêtes de fin d'année. L'enquête sur les causes du drame, menée par des magistrats du pôle accidents collectifs de Marseille, se focalise sur le fonctionnement du passage à niveau.
La version de la conductrice contredit les "constatations matérielles". Selon l'avocate de certaines familles de victimes, Me Jehanne Collard, un audit interne de la SNCF indique que le passage à niveau fonctionnait bien, "les barrières étaient baissées, le feu rouge et le signal sonore fonctionnaient". La version de la conductrice contredit les premières "constatations matérielles" dont a fait état le procureur de Marseille, Xavier Tarabeux, qui vont "plutôt dans le sens d'une barrière fermée", tout comme les témoignages du conducteur du TER et des chauffeurs des véhicules qui se trouvaient de l'autre côté de la voie ferrée.