"Le dispositif n'a pas à être renforcé, il a été renforcé dès le début." En visite au marché de Noël de Strasbourg, mardi, le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux s'est voulu rassurant. Au lendemain de l'attentat au camion qui a fait au moins 12 morts à Berlin, le risque terroriste était pourtant sur toutes les lèvres. L'attaque, dont l'auteur est probablement en fuite selon la police allemande, ravive le souvenir de la tuerie de Nice, qui avait fait 86 morts le 14 Juillet sur la promenade des Anglais. Mais à quelques jours de Noël, le gouvernement assure que la France s'est depuis adaptée à la menace permanente, sans attendre le drame berlinois.
Des camions benne sur les ponts. Début décembre, dès l'ouverture du marché de Noël de Strasbourg, le plus vaste de l'hexagone, des mesures spécialement destinées à prévenir l'intrusion de véhicules dans une foule dense ont ainsi été mises en place. "Il y a des camions bennes sur les différents ponts d'accès au coeur de la ville, là où se tient le marché", explique Roland Ries, le maire PS de la ville. Le long des lignes de tramway en direction du centre-ville, des fosses ont été creusées pour éviter tout emprunt par des véhicules non-autorisés. Des bornes escamotables et un important dispositif policier ont également été mis en place. "Je crois qu'on a pris les dispositions qu'il fallait. On a tiré les conclusions de Nice, indéniablement", estime Roland Ries.
Au-delà de ces mesures, les effectifs de surveillance ont été considérablement renforcés, explique le maire : "L'essentiel se fait quand même au niveau professionnel, du côté de la police municipale, de la police nationale et des CRS, qui filtrent les entrées." Selon Philippe Lavenu, secrétaire national du syndicat Alliance Police Nationale, 80% des gardiens de la paix sont mobilisés pour la période des fêtes en France. "On est dans un dispositif maximum, il y a beaucoup de disponibilités de la part de nos collègues", assure-t-il. Pour le seul marché de Strasbourg, où quatre personnes soupçonnées de préparer des attentats sur le sol français ont été arrêtées, fin novembre, plusieurs unités de gendarmes et de gardes mobiles ont été dépêchées.
"Toutes les manifestations de fin d'année". "Il n'existe pas en France un dispositif similaire à celui mis en place à Strasbourg", reconnaît le directeur de la sécurité publique (DDSP) du Bas-Rhin, Jean-François Illy. Mais au-delà de cet évènement, comment les autres villes de France sont-elles protégées ? La sécurité a été "renforcée sur toutes les manifestations de fin d'année", assure Bruno Le Roux. "Dans ces rassemblements, il doit y avoir, pour nos concitoyens, la certitude que toutes les mesures ont été prises." Cette année, la police travaille "avec les directeurs de grands magasins, et les entreprises de sécurité privées" pour assurer la sécurité de plusieurs marchés de Noël, selon Philippe Lavenu.
Sur le marché de Noël des Champs-Élysées, à Paris, qui figurait parmi la dizaine de cibles potentielles des hommes arrêtés à Strasbourg, un véritable arsenal de protection a été mis en place : cars de CRS supplémentaires sur les quais de Seine, barrières maintenues par des chaînes et des cadenas des deux côtés de l'avenue… De quoi rassurer les commerçants, régulièrement informés lors de réunions dédiées à la sécurité. "Une fois par semaine, on a un briefing pour nous dire qui il faut surveiller, regarder s'il y a quelqu'un de suspect, si personne ne laisse quelque chose à l'abandon", explique Yoann, qui tient un stand de soupe au chaudron. Les vendeurs disposent de numéros directs pour joindre la police en cas de comportement suspect.
Le public, habitué des contrôles ? Résultat : mardi midi, la fréquentation sur le marché des Champs-Elysées était comparable à celle des jours précédents, malgré l'attaque de Berlin. Le signe que les dispositifs de sécurité mis en place suffisent à rassurer les visiteurs ? "Ils acceptent très volontiers les mesures qui sont prises, y compris les contrôles. Parfois, ils reprochent même de ne pas avoir été assez contrôlés", assure Roland Ries. "C'est un élément nouveau, je me souviens d'une époque où les contrôles de police étaient un peu rejetés", souligne l'élu. Après le drame de Berlin, le ministre de l'Intérieur a appelé "l'ensemble des forces de l'ordre à maintenir une vigilance maximale et à conserver (leur) détermination face à la barbarie".