Peut-on inscrire à l'état civil français les enfants nés à l'étranger de gestation pour autrui (GPA), une pratique interdite en France ? Lors d'une audience très attendue ce vendredi, la Cour de cassation doit examiner cette question d'autant plus délicate qu'elle a valu à la France d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).
>> Quel est l'objet de cette audience ?
La plus haute juridiction va se pencher sur les pourvois concernant deux enfants nés par GPA, en Russie, de pères français : l'inscription à l'état civil, pour le premier cas, avait été refusée par la cour d'appel de Rennes le 15 avril 2014, mais acceptée pour le second par la même juridiction le 16 décembre.
La Cour de cassation, qui a toujours rejeté les pourvois relatifs à la transcription à l'état civil d'enfants nés de mères porteuses à l'étranger, pourrait changer sa décision.
Le 26 juin 2014, la CEDH avait en effet reconnu à la France le droit d'interdire la GPA sur son territoire mais, arguant de l'intérêt supérieur de l'enfant, avait estimé qu'elle ne pouvait porter atteinte à "l'identité" des bébés nés de mères porteuses à l'étranger en refusant de les reconnaître.
>> Le procureur général de la Cour a déjà donné son avis, est-ce un indicateur ?
Pas du tout. Le procureur général a exprimé son point de vue personnel mais rien ne dit que la Cour le suivra.
Qu'a recommandé le procureur général Jean-Claude Marin ? En mai dernier, il a préconisé une inscription à l'état civil français des enfants nés par GPA à l'étranger… à condition qu'un test génétique de paternité (ADN) établisse la filiation. Ainsi, l'état civil reconnaîtrait le père biologique de ces enfants mais pas leur mère "d'intention".
Une "solution" qui vise clairement à trouver un équilibre entre l'interdiction de la gestation pour autrui (GPA) en France et la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) pour la non-reconnaissance d'enfants nés de mère porteuse à l'étranger. Un avis loin de satisfaire les principaux intéressés et le Défenseur des Droits pour qui on "trahit l'esprit de l'arrêt rendu par la CEDH".
>> Que va t-il se passer vendredi ?
Lors de l'audience qui sera publique, le procureur général réitérera ses recommandations devant l'assemblée plénière de la Cour. Les juges de la Cour écouteront aussi les autres parties et notamment Me Patrice Spinosi, l'avocat du Défenseur des Droits. Ils mettront ensuite leur décision en délibéré.
>> Quand connaîtra-t-on la décision de la Cour ?
La Cour de cassation annoncera formellement vendredi la date à laquelle elle rendra sa décision. Selon toute vraisemblance, ce sera fin juin, début juillet.