Alerte rouge sur les cimetières. Les concessions perpétuelles empêchent de nombreux habitants d'être inhumés dans leur ville, faute de place. C'est notamment le cas dans la capitale, où la situation est telle qu'un Parisien n'a quasiment aucune chance de se faire inhumer dans l'un des quatorze cimetières de la capitale. Certaines mairies ont pris le problème à bras-le-corps et repèrent les tombes abandonnées pour faire de la place, interdisent la réservation d'emplacement ou refusent de vendre des concessions perpétuelles. Et d'autres construisent des crématoriums.
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Être enterré à Paris est un luxe
La situation est particulièrement critique à Paris. Un habitant de la capitale n'a pratiquement aucune chance d'être enterré dans l'un des quatorze cimetières de la ville. L'année dernière, seulement 171 concessions se sont libérées alors que la mairie avait reçu près de 5.000 demandes. Pourtant, il suffit de se promener au cimetière du Père-Lachaise, dans le 20ème arrondissement de Paris, pour voir des tombes centenaires, en ruine.
Une situation qui indigne Colette, une Parisienne de 70 ans, croisée dans les allées. "Tous ces trucs-là, c'est quand même limité dans le temps, sinon où on va ? Alors comment c’est géré ? Si vous dites, sur 5.000, il y en a que quelques-uns qui ont été accordés, à quel niveau, on tranche ?", s'interroge-t-elle.
Des concessions perpétuelles bloquées. Autre fait étonnant, à Paris, il n'existe pas de liste d’attente. Si une concession est libre le jour d'un décès, alors elle est attribuée au défunt. Et pour que cette concession soit perpétuelle, il faudra débourser 15.000 euros. Quant à ceux qui n'ont pas de place ou pas les moyens d'en acheter une, ils devront être inhumés dans l'un des six cimetières de banlieue gérés par la capitale.
C'est le cas pour la majorité des Parisiens, victimes de pratiques du passé. "Pendant des années, on a vendu des concessions avant le décès et des concessions perpétuelles, ce qui fait qu'aujourd'hui on a 97% de concessions perpétuelles avec des ayants-droits qui ne veulent pas qu'on les reprenne", déplore Pénélope Komitès, adjointe à la mairie de Paris en charge des affaires funéraires
Une problématique que l'on retrouve dans d'autres villes. Et cette situation de concessions bloquées n'est pas spécifique à Paris, il existe d'autres villes, grandes ou petites, qui rencontrent le même problème. Par exemple, à Noyon, dans l'Oise, où il n'y a plus que 37 emplacements pour une centaine d'inhumations par an. Il y a aussi le cas de Châtellerault, dans la Vienne, ou Herblay, dans le Val d’Oise, qui auraient besoin d'un nouveau cimetière.
Le boom des crémations, l'abandon des concessions perpétuelles
Récupérer les concessions abandonnées. Pour régler cette question, certaines mairies ont pris les choses en main. C'est le cas de celle de Coulommiers, en Seine-et-Marne. La mairie y reprend les concessions de toutes les tombes abandonnées. Avec ce système, elle parvient à libérer quarante places par an. "Il faut se donner beaucoup de mal s'il y a de la famille", reconnaît Sylviane Perrin, adjointe à la mairie qui se charge de cette mission. "Pour nos 346 tombes, les recherches ont été faites et sont prêtes. Il nous faut juste un peu de sous", poursuit-elle, alors que "relever une tombe coûte entre 700 et 2.400 euros".
Arrêter de vendre des concessions perpétuelles. Un prix que toutes les communes ne peuvent pas payer. Alors certaines d'entre elles ont recours à une autre méthode : arrêter de vendre des concessions perpétuelles, ou stopper la possibilité de réserver sa place à l’avance. Mais Paris reste un cas particulier car beaucoup de tombes et de chapelles font partie du patrimoine et sont des arguments touristiques.
Se tourner vers la crémation. Face à ces difficultés à se faire inhumer dans certaines villes, les Français semblent changer leurs pratiques. Selon un baromètre Ipsos publié début octobre, près de 60% des Français seraient prêts à choisir la crémation, contre moins de 1% dans les années 1980.
La crémation est aussi plus souvent choisie depuis que l'Église catholique a décidé de tolérer cette pratique en 1962. Mais alors qu'une dizaine de crématoriums sortent de terre chaque année en France, certaines communes peinent aujourd'hui à suivre, comme à Toulouse où l’on doit en construire un deuxième.