Avez-vous déjà goûté un vin chti ou un rouge de Bretagne ? A priori non puisque jusque là, ces vins, souvent produits par des associations ou des particuliers n'avaient pas le droit d'être commercialisés. Et bien cela pourrait changer. A partir du 1er janvier, il sera possible de planter des vignes n'importe où en France pour produire des "vins sans indication géographique". Une mesure qui fait déjà trembler le monde viticole car notre carte des vins français pourrait bien être chamboulée.
Une décision européenne. C'est fin décembre que cette décision a été prise. Les experts du vin, réunis au sein de FranceAgriMer, ont validé officiellement une décision européenne de 2007. L'objectif est de libéraliser la culture du vin dans les pays membres de l'Union Européenne en donnant la possibilité aux vignerons d'étendre leurs vignes et d'en planter des nouvelles. Une décision qui pourrait faire croître de 1% par an la surface viticole française, soit 8057 hectares supplémentaires l'an prochain. Dans une interview accordée au Parisien, Jean-Luc Dairien, le directeur de l'Inao (Institut national de l'origine et de la qualité) s'explique : "dans certaines régions, les plantations de nouvelles vignes seront automatiques. Dans d'autres, nous déciderons de les limiter". Les conseils régionaux des zones concernées par ces nouvelles plantations pourront également imposer un plafond.
En outre, les autorisations seront délivrées sous réserve d'un engagement de ne pas détourner la notoriété d'une appellation ou indication protégée (par exemple le champagne) et donc d'en respecter le cahier des charges au moins jusqu'en 2030. Une priorité sera accordée aux "nouveaux venus" âgés de moins de 40 ans.
Une concurrence au bon vin français ? Certains se réjouissent de l'apparition de ces "vins sans indication géographique". C'est le cas de Patrice Bressac, le président de l'association des vignerons franciliens, qui confie au Parisien que "la mesure est attendue de longue date". Un avis que ne partagent pas du tout les viticulteurs Champardennais, qui craignent que le vin blanc et le rosé picard ne viennent voler la vedette à leur célèbre champagne.
Un changement culturel profond. Même si la culture de la vigne n'est pas accessible au premier venu puisqu'elle nécessite un savoir-faire et des matériaux bien spéciaux, cette décision européenne risque de changer drastiquement la carte de France des vins, afin de produire des vins au goût des Chinois, des Américains ou des Brésiliens. De quoi chambouler largement nos papilles. Et Gérard Samson, unique vigneron en Normandie, l'admet d'ailleurs volontiers dans Le Parisien, "cette ouverture va donner un peu d'air. Mais le risque est désormais de produire en France de très mauvais vins pour de pures raisons commerciales".
La carte des vins français chambouléepar Europe1fr