Le devenir de la proposition de loi instituant un "droit à une fin de vie libre et choisie" replace le sujet de l'euthanasie au centre de l'actualité en France. Prévue jeudi à l'Assemblée nationale dans le cadre de la niche parlementaire attribuée au groupe Libertés et Territoires du député Olivier Falorni qui est à l'origine du texte, l'adoption de cette proposition de loi a toutes les chances de ne pas avoir lieu à cause du dépôt de quelques 3.000 amendements, dont 2.300 viennent de députés Les Républicains. Cela pourrait rendre mécaniquement impossible l'examen du texte sur une seule journée. Michel Philippin, qui a accompagné sa femme dans le cadre d'une "mort volontaire médicalement assistée" en Suisse en 2014 déplore cette situation, évoquant, mercredi sur Europe 1, "une question de civilisation."
"Ça viendra, un jour, en France"
Les oppositions se cristallisent surtout autour de la création d'un droit à l'euthanasie pour les personnes souffrant d'une pathologie incurable. Dans Le Figaro, l'écrivain Michel Houellebecq a ainsi estimé qu'une "civilisation qui légalise l'euthanasie perd tout droit au respect". "Ce sont les pays civilisés qui ont adopté cette loi permettant aux gens de mourir dignement et d'éviter des agonies complètement inutiles", répond Michel Philippin. Pour ce dernier, la création éventuelle d'un droit à l'euthanasie est un progrès. Et "le progrès de la civilisation n'est pas de s'attacher à des valeurs qui sont complètement obsolètes et ont un fondement qui vient du fond des âges comme le commandement 'tu ne tueras point'", estime-t-il.
Quoiqu'il advienne du nouveau texte - qui veut aller plus loin que la loi Claeys-Leonetti de 2016 autorisant la sédation profonde et continue -, Michel Philippin estime que cette possibilité arrivera un jour ou l'autre dans notre pays. "Tous nos proches voisins adoptent les uns après les autres cette loi qui permet aux gens de choisir leur fin de vie librement", remarque-t-il. "Ça viendra un jour en France."
"En France, en échec thérapeutique, on est complètement abandonné par la médecine"
Cette conviction, Michel Philippin l'a tient de son expérience auprès de sa femme Mireille. Il décrit les douleurs neuropathiques "d'une violence inouïe" qu'elle subissait sans le moindre espoir de convalescence après avoir "été déclarée en échec thérapeutique à la fin d'un long parcours médical de cinq ans". Seule une démarche dans un autre pays, en Suisse donc, a pu mettre fin à ces souffrances provoquées par une lésion du système nerveux. "Ce qui était dommage, c''était d'être obligé d'aller en Suisse pour pouvoir mourir dignement, alors que c'est un acte médical qui est très simple", regrette Michel Philippin. Il déplore "qu'en France, à partir du moment où on est déclaré en échec thérapeutique, on est complètement abandonné par la médecine".
A propos de la mort de sa femme, Michel Philippin rappelle que "Mireille le voulait". "C'était une délivrance pour elle est. Ce qui est paradoxal, c'est que quand on lui a annoncé qu'elle allait pouvoir mourir en dignité en Suisse, ça l'a remplie de joie. Et ça nous a rempli de joie aussi, parce que c'était enfin le terme de cette souffrance."