Un juge d'instruction français a lancé des mandats d'arrêt internationaux contre trois hauts responsables du régime syrien, soupçonnés d'être impliqués dans des exactions ayant notamment visé deux citoyens franco-syriens disparus en 2013 et déclarés morts cet été, a appris l'AFP lundi de source judiciaire. Conformément aux réquisitions du parquet, ces mandats ont été lancés pour "complicité d'actes de tortures", "complicité de disparitions forcées" et "complicité de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et de délits de guerre", a précisé cette source, confirmant une information du Monde.
Suites de l'enquête "César". Sont visés l'ex-chef des renseignements syriens devenu directeur du bureau de la sécurité nationale Ali Mamlouk, le chef du service de renseignement de l'armée de l'Air syrienne en poste après mai 2011 Jamil Hassan et le directeur de la branche de Bab Touma (Damas) du service de renseignements de l'armée de l'Air Abdel Salam Mahmoud. Dans ce dossier, le parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire en 2015, après la découverte de l'arrestation d'un père et de son fils, Mazen et Patrick Dabbagh, grâce à l'enquête dite "César", du nom d'un ex-photographe de la police militaire syrienne qui s'est enfui de Syrie en 2013, emportant 55.000 photographies de corps torturés.
Deux Franco-Syriens déclarés morts. Une information judiciaire avait ensuite été ouverte en octobre 2016 pour "disparitions forcées et actes de torture, constitutives de crimes contre l'humanité" et les investigations confiées à des juges d'instruction du pôle crimes contre l'humanité et crimes de guerre, quelques jours après le dépôt d'une plainte contre X par le frère et oncle des disparus, la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et la Ligue des droits de l'Homme (LDH). Les deux Franco-Syriens avaient été arrêtés en novembre 2013 par des officiers déclarant appartenir aux services de renseignement de l'armée de l'Air syrienne. Transférés à la prison de al-Mezzeh, dénoncée comme un centre de torture du régime, ils n'avaient plus donné signe de vie jusqu'à être déclarés morts par le régime cet été, a indiqué dans un communiqué la FIDH. La publication des actes de décès a justifié l'extension des investigations des juges, notamment à des "homicides volontaires" et à des "atteintes volontaires à la vie constitutives de crimes contre l'humanité", selon la source judiciaire.
De nombreuses enquêtes visant le régime syrien sont menées en Europe, notamment en Allemagne, aux Pays-Bas au Royaume-Uni et en France. En France, il s'agit du deuxième conflit le plus important, en nombre de dossiers traités, derrière le Rwanda, pour le pôle crimes contre l'humanité, crimes et délits de guerre, avait indiqué le 18 octobre lors d'un colloque à Paris Aurélia Devos, vice-procureure à la tête du parquet au pôle.