Alain Cocq compte se laisser mourir. 8:15
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Antoine Terrel
Invitée samedi d'Europe 1, la médecin Véronique Fournier a réagi au débat autour de la situation d'Alain Cocq, ce patient atteint d'une maladie incurable et qui a cessé son traitement après s'être vu refusé la possibilité d'un suicide assisté. Pour elle, la loi Claeys-Léonetti de 2016 sur la fin de vie n'est pas assez claire. 
INTERVIEW

C'est une affaire qui relance une nouvelle fois le débat sur la fin de vie. Dans la nuit de vendredi à samedi, Alain Cocq, atteint d'une maladie incurable, a annoncé avoir cessé son traitement, toute alimentation et hydratation, pour se laisser mourir en direct, afin de dénoncer "l'agonie" contrainte par la loi actuelle sur la fin de vie. Une démarche qui fait suite au refus d'Emmanuel Macron de l'aider à mourir en autorisant un suicide assisté  par la prescription d'un barbiturique. Invité samedi d'Europe 1, Véronique Fournier, médecin et ancienne présidente du Centre national de soins palliatifs et de la fin de vie est revenue sur cette affaire. Selon cette spécialiste, l'un des problèmes ayant mené à cette situation est le manque de clarté de la loi Claeys-Léonetti de 2016. 

"Qu'Alain Cocq considère que la vie qu'il doit continuer à vivre est insupportable, et qu'il souhaite l'interrompre, est selon moi un droit absolu de tout citoyen arrivé à cet endroit de sa souffrance et de sa maladie", assure tout d'abord Véronique Fournier au micro de Frédéric Taddeï dans C'est arrivé cette semaine, plaisant pour un "droit à la non-obstination déraisonnable". Or, rappelle-t-elle, Alain Cocq, militant de la fin de vie "digne", est "maintenu en vie par beaucoup d'assistance, de sondes, de tuyaux, par une alimentation artificielle", et se trouve dans un "grand état de dépendance et de déclin". Et de poursuivre : "Qu'il dise que ça suffit, on ne peut que le respecter et l'accompagner".

L'injection de barbiturique réclamée par le patient est aujourd'hui illégale, la France n'autorisant pas le suicide assisté dans la loi. Mais la loi Claeys-Léonetti sur la fin de vie, adoptée en 2016, autorise d'autres la sédation profonde "justement pour pouvoir accompagner ces personnes quand elles arrêtent toute médecine et assistance et qu'elles n'en souffrent pas", rappelle encore Véronique Fournier. Seulement, cette sédation est autorisée uniquement pour les personnes dont le pronostic vital est engagé "à court terme". Or Alain Cocq ne peut lui pas prouver que sa fin de vie approche à court terme.

Des médecins "farouchement braqués" sur la question du délai

Pour l'invitée d'Europe 1, le problème vient des différentes interprétations de la loi par les professionnels. "Je connais plein de médecins qui aurait dit à Alain Cocq : 'Je suis prêt à vous accompagner, à être chez vous et mettre en place la sédation profonde et continue jusqu'au décès, de façon à ce que vous ne souffriez pas'. Malheureusement, beaucoup de gens ont compris la loi Claeys-Léonetti différemment, et disent : 'Si le patient ne va pas mourir dans les 48 heures, je ne le fais pas". Et Véronique Fournier de conclure : "Si la loi est ambiguë, il faut la clarifier, l'expliciter davantage". 

Car pour l'ancienne présidente du Centre national de soins palliatifs et de la fin de vie, si le cas d'Alain Cocq entre bien dans le cadre de la loi, il y a "des interprétations possible de la loi sur le terrain", et dans le monde médical, on trouve des médecins et des soignants " farouchement braqués" sur la question du délai. Elle plaide en tout cas pour accompagner Alain Cocq "dans toute la compassion solidaire qu'on peut lui apporter en tant que société". Et cet accompagnement "est possible avec la sédation profonde et continue jusqu'au décès".