La semaine à venir sera celle des lanceurs d'alerte. Lundi se tiendra au Luxembourg la dernière audience d'appel du procès LuxLeaks tandis que mercredi marquera, à Paris, le début du festival "Lanceurs d'alerte" à la Gaieté lyrique.
Faut-il juger ou encourager et protéger les lanceurs d'alerte ? Florence Hartmann, ancienne porte-parole de la procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et ancienne journaliste du Monde, était l'invitée dimanche de l'émission C'est arrivé demain pour répondre à la question.
"Une petite infraction" pour en révéler une plus importante. "L'information qu'un lanceur d'alerte révèle n'est pas accessible au public. Elle est importante (elle traite d'évasion fiscale, d'environnement, de médicaments) et on a des multinationales qui, pour protéger leurs intérêts, cachent des informations. Ils ne cherchent pas à protéger l'intérêt général mais le leur. L'information est tellement cachée que seuls les gens de l'intérieur - les insiders - peuvent le savoir. Souvent, les gens alertent au sein de l'entreprise ou de l'administration" mais l'individu se heurte alors à une loi du silence "comme dans une mafia". La personne a un cas de conscience et décide de révéler le secret. "Il y a une petite infraction pour permettre d'en révéler une beaucoup plus grosse."
Une évolution législative "lente". Du point de vue législatif, l'ancienne journaliste considère que les réactions ont été très lentes. "La loi Sapin 2 a fait des efforts suite à l'affaire LuxLeaks. A chaque fois qu'il y a des révélations via des lanceurs d'alerte, on essaie de faire quelque chose mais on est très loin du compte. Généralement, les lanceurs d'alerte payent très cher et le fait qu'il ne soient pas protégés n'encouragent pas ceux qui sont face à une alerte à faire ce qu'il faut." Julian Assange, personnage controversé, n'est pas un lanceur d'alerte pour Florence Hartmann dans le sens où, selon elle, il a fait de Wikileaks "un business" et dévoile des informations confidentielles sans discernement.
Une confidentialité plus ou moins légitime. L'émergence de la notion d'alerte démontre, selon la spécialiste, "une perte de confiance dans les institutions peut-être parce qu'il n'y a pas assez de publicité sur ce qui relève de la chose qui peut être publique. Cela nous éviterait pas mal de théories du complot, d'avoir plus confiance et de se sentir plus citoyen participant".
Par ailleurs, l'ex journaliste, elle-même emprisonnée quelques jours pour avoir révélé les dessous d'une décision de justice du TPIY, estime que la "confidentialité" peut ne pas être "légitime". "Elle est parfois utilisée, même par une institution qui a droit au secret des affaires, pour cacher une irrégularité."