Forte augmentation du nombre d'agriculteurs en détresse

Le nombre d'appels à la permanence de prévention du suicide a triplé en un an. © GUILLAUME SOUVANT / AFP
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avec AFP , modifié à

Précarité économique, intérêt de leur métier : de plus en plus d'agriculteurs appellent la permanence téléphonique de secours qui leur est dédiée.

Le nombre d'appels au secours d'agriculteurs et de leur entourage à la permanence de prévention du suicide Agri'écoutes a explosé en début d'année, et nombre de paysans sont "résignés" face à la crise, selon le président de la mutualité sociale agricole (MSA).

Une augmentation relative. "Il y a une résignation dans la campagne face à la crise", explique Pascal Cormery. Lors du premier semestre 2016, Agri'écoutes a reçu quelque 1.700 appels, soit une moyenne de 285 appels par mois contre une centaine par mois sur la même période, un an plus tôt. Ce quasi-triplement est relativisé par la MSA, qui rappelle notamment que ce dispositif lancé en octobre 2014 n'a commencé à être connu de l'ensemble du monde agricole qu'à compter des mois de mars/avril 2015. La MSA ne nie pas toutefois une très forte augmentation du nombre d'agriculteurs en détresse.

"On est là pour faire quoi ?". Autre signe de cette précarité croissante dans le monde paysan, l'explosion de la demande de primes d'activité : alors que la MSA attendait 60.000 demandes pour l'année 2016, elle en est déjà à 200.000 demandes depuis le début de l'année. Elles concernent pour un tiers les exploitants, et pour deux tiers les salariés. "Il y a une interrogation dans les campagnes sur le sens de notre métier : 'on est là pour faire quoi ?'", appuie Pascal Cormery, qui insiste sur une "résignation complète" du secteur. "Beaucoup de mes collègues me disent : 'est-ce qu'on a vraiment besoin de nous ?, est-ce qu'on sert vraiment à nourrir la population ?'", ajoute le président de la MSA.

Les femmes appellent pour les hommes. Si, au départ, c'était surtout les exploitants qui appelaient pour se confier, la MSA note que ce sont désormais le plus souvent les épouses qui contactent Agri'écoutes, "par rapport au désarroi de leur mari". "Les hommes ont sans doute plus de pudeur, ou de fierté. Il est très difficile de s'avouer qu'on est en échec professionnel", explique Michel Brault, directeur général de la MSA. "Lorsqu'il n'y a plus de revenus qui rentrent, un fort endettement, l'homme n'ose plus appeler. Il se réfugie dans le travail, ne s'occupe plus des papiers, des échéances, c'est le conjoint qui est confronté à cela", ajoute-t-il.