Emmanuel Macron souhaite une grande concertation avec les "gilets jaunes". Mais pour ces derniers, c'est le flou. Qui pour représenter le mouvement au niveau régional et national ? Dans quelles conditions d'organisation ? De nombreuses questions restent sans réponse à la veille d'une réunion entre une "délégation officielle" de "gilets jaunes" et Edouard Philippe à Matignon.
La crainte d'une structure "politisée ou syndicalisée". A Calais, par exemple, les "gilets jaunes" sont particulièrement mobilisés depuis le début du mouvement. Si leur détermination reste forte, il existe un besoin de coordonner les actions. Quant à la grande concertation nationale proposée par Emmanuel Macron, Sébastien se demande comment mettre en place ces comités représentatifs du mouvement : "Ce dont on a peur avec une structure, c'est qu'elle soit politisée ou syndicalisée. C'est ce dont on ne veut pas mais c'est vrai que ce serait bien d'avoir un porte-parole par région."
D'après lui, ce n'est pas avec les barrages que les "gilets jaunes" parviendront à se faire entendre. "Il faut se mettre à la table avec Edouard Philippe. Il n'y a que comme cela que l'on pourra se faire entendre", disait-il avant l'annonce de la réunion vendredi à Matignon. Aujourd'hui, c'est un dialogue de sourds. Il nous répond par médias interposés et nous on lui répond sur des barricades. Ce n'est pas comme ça que l'on va arriver à communiquer", analyse-t-il.
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"Que ce mouvement soit représenté au niveau de l'Etat." Si l'organisation de cette concertation reste floue, Claude estime de son côté qu'il faudra porter les revendications des "gilets jaunes" au plus haut niveau : "On veut aujourd'hui que ce mouvement soit représenté au niveau de l'Etat. Avant de prendre les décisions, la voix du peuple doit être entendue. Que l'on puisse au moins entendre la voix du peuple, retranscrire l'information, mais la vraie information. Pas celle qui se fait entre les bureaux parce que c'est ce qu'il se passe actuellement."
Nathanaël, de son côté, tente de contacter les "gilets jaunes" régulièrement mobilisés dans la région via les réseaux sociaux afin de réorganiser le mouvement localement. "Une fois que l'on aura réussi à rassembler des gens de tous les coins de la région Hauts-de-France", il sera possible "de discuter et de voir, si on procède à un vote qui souhaite se présenter", explique-t-il sur Europe 1. "L'idée, ce serait d'élire des porte-parole régionaux."
D'autres méthodes de communication. Des porte-parole régionaux plus légitimes, c'est aussi ce que réclame André, mobilisé en Bretagne : "Je reste persuadé qu'il faut des gens sur le terrain, qui sont du terrain, et surtout qui entendent le plus de choses possibles pour pouvoir retranscrire quelque chose de réel." En attendant, les blocages se poursuivent en Bretagne, tout comme dans la Meuse où la surveillance de la police a même poussé les "gilets jaunes" à faire attention aux communications.
"Le problème, c'est que l'on s'est aperçu que les réseaux sociaux, c'était grillé. Les SMS, n'en parlons même pas. Donc on se déplace pour voir les gens", confie l'un d'eux. Quinze jours après le début du mouvement, beaucoup de "gilets jaunes" reconnaissent que leurs méthodes sont encore artisanales mais promettent un nouveau samedi de mobilisation partout en France.
A Paris, "on part au casse-pipe pour rien". Dans le Var, les "gilets jaunes" occupent le péage du Muy depuis douze jours. "Il y a toujours du monde. Les gens se relaient naturellement", explique Nora, secrétaire dans une entreprise de transport. Parmi eux, certains seront à Paris samedi, tandis que d'autres avouent ne pas avoir le budget pour pouvoir s'y rendre. Mais ils sont tous convaincus que la lutte doit se poursuivre partout en France.
"Paris, pour nous, ça partait d'une bonne idée mais on sait très bien qu'on aura une infiltration de casseurs. On part au casse-pipe pour rien. On va se faire une mauvaise image et on ne va rien gagner", explique l'un des "gilets jaunes" présent au péage du Muy. "Il faut continuer le mouvement dans nos régions."
"Il faut taper dur." "Moi, je vois la révolte à Paris mais je la vois aussi sur les ports à Marseille, au Havre, à Rouen. Je pense que c'est là qu'il faut taper, il faut arrêter de faire chier les gens, les gens qui vont chercher leurs enfants à l'école, qui vont travailler. Il faut taper dur et se rendre à Paris", assure quant à lui, Lorenzo, un entrepreneur de 19 ans. Un durcissement du mouvement, voilà ce que tout le monde prédit au Muy.