Il est qualifié de rapport "choc". Jeudi, les résultats de l'enquête menée par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur le glyphosate sont présentés au Sénat. L'objet de ce rapport n'est pas de savoir si le glyphosate est dangereux ou non pour la santé mais tend plutôt à montrer à quel point il est difficile de trancher la question et les difficultés auxquelles se heurtent les agences d'évaluation européennes dont c'est justement la mission.
Deux sortes d'agences et deux méthodes
L'enquête explique donc pourquoi il existe des divergences de positions sur le glyphosate entre le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l'OMS, qui classe en 2015 l'herbicide comme un cancérigène probable pour l'homme, alors que la plupart des agences européennes et mondiales assurent qu'il n'y pas de lien entre glyphosate et cancer.
D'après ce rapport, ces instances n'ont pas travaillé sur les mêmes sources et n'en ont pas fait la même interprétation. Le rapport conclut finalement que l'EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) semble avoir besoin de plus de preuves que le CIRC pour établir un lien entre glyphosate et cancer.
Il y a deux sortes d'agences et donc deux méthodes d'évaluation. C'est une grande partie du problème. Le CIRC regarde si un produit, que ce soit le glyphosate ou la viande rouge, est dangereux en soi. Les chercheurs qui composent ces panels ne doivent pas avoir de lien avec l'industrie et cette agence observe simplement les études scientifiques publiées.
Des agences européennes moins indépendantes ?
En face, il y a les agences réglementaires, comme l'EFSA, l'agence européenne. Leur mission est de déterminer si l'on peut mettre un produit sur le marché et à quelles conditions. Et pour cela, elles se basent avant tout sur un dossier préparé par l'industriel. Il s'agit d'études très poussées mais qui, jusqu'à récemment, n'étaient pas rendues publiques. Elles sont payées par l'entreprise car on estime que c'est la société qui doit payer si elle souhaite être en mesure de commercialiser son produit. Par ailleurs, les experts européens sont recrutés de façon un peu moins stricte qu'à l'OMS.
Le rapport parlementaire donne des pistes pour rendre ces agences réglementaires comme l'EFSA ou l'Anses en France (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) plus indépendantes, en leur donnant plus d'argent pour demander des études supplémentaires ou pour mieux contrôler celles des industriels, par exemple. Cela est fondamental pour que les citoyens puissent avoir confiance lorsqu'une substance à risque comme le glyphosate est autorisée sur le marché.