Le philosophe Bernard-Henri Lévy a ouvert jeudi à Paris l'hommage national à Claude Lanzmann, le réalisateur de "Shoah" décédé à 92 ans, saluant l'"intellectuel engagé et querelleur", le "poète" et le "héros". "Lanzmann, comme Orphée, était un poète. Il était un poète sauvage dont les vers étaient des voies ferrées, des herbes folles, des forêts de bouleaux, des silences, des noms", a salué BHL dans son éloge funèbre prononcé dans la cour d'honneur de l'hôtel militaire des Invalides à Paris.
BHL le compare à "Orphée". Visiblement ému, il l'a comparé à "Orphée" "qui a fait le voyage en enfer" et "a pris le risque extrême d'aller, sans se retourner, et non pas une, ni deux, mais maintes fois, chercher son Eurydice aux visages innombrables mais effacés", l'Euridyce "que lui était, par-delà les morts, le peuple juif ressuscité". "Chez ce Lanzmann orphique", "qui n'avait pas craint, naguère (...) de défendre sa patrie les armes à la main, il y avait vraiment l'idée que la force peut être juste et que le peuple juif se doit, lui aussi, d'être fort", a-t-il poursuivi.
"Il fallait un artiste pour faire l'histoire". Peu après, le Premier ministre Edouard Philippe a salué la mémoire du réalisateur. "Vous avez fait exister ceux qui ne sont plus", a-t-il expliqué. "Il fallait un artiste pour faire l'histoire. (...) pour la dire, la montrer, la nommer, pour nous la faire toucher du doigt. Surtout celle-là. La plus sombre qui fût (...) Il fallait nous en faire toucher la noirceur. De génération en génération", a poursuivi Edouard Philippe. "Les chemins de la liberté, vous en vivez les embuscades, les ornières avec vos camarades, exposés aux mortiers allemands ou surpris, dans les montagnes, par des miliciens. Sous vos faux noms, vous vivez déjà plusieurs vies", a-t-il ajouté, rappelant son passé de résistant en 1943 à Clermont-Ferrand.