INFO EUROPE 1 - Les nouveaux attendus fragiles du futur concours des profs de collège et de lycée inquiètent

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Louise Sallé // Crédit photo : FRANK PERRY / AFP , modifié à

Face à la pénurie de candidats au Capes, le gouvernement choisit de recruter les profs à bac + 3 au lieu de bac + 5. Cela entraîne, logiquement, une baisse du niveau des attendus au concours. Et même si les étudiants continuent d’étudier leur discipline après cet examen, en master, les compétences demandées en fin de licence paraissent faibles.

La crise du recrutement des enseignants s'enlise. Le concours attire de moins en moins de candidats et des classes se retrouvent sans professeurs, faute de remplaçants en cas d’absences. Le gouvernement a donc lancé une réforme, confirmée début avril par Emmanuel Macron : l’examen, qui évalue actuellement les candidats à bac+5, sera décalé à bac+3 à partir de juin 2025, à la fois pour les enseignants du premier et du second degré. 

Conséquence : les exigences du concours sont revues à la baisse. Europe 1 s’est procuré la liste des attendus du futur Capes, le concours qui recrute les profs du collège et du lycée, dans plusieurs disciplines. Et même si les jeunes profs approfondiront leurs connaissances en master, ce nouvel examen placé en fin de licence inquiète en raison de la faiblesse des compétences demandées.

En maths, certaines notions du programme de "mathématiques expertes" ne sont plus exigées à l’écrit

En mathématiques, le niveau du Capes actuel est déjà bas, mais les attendus du futur concours baissent encore d’un cran. Dans le projet de maquette de l’examen qu’Europe 1 s’est procuré, plus besoin, pour l’épreuve écrite, de maîtriser la "Théorie des graphes", une notion pourtant enseignée aux Terminales ayant choisi l’option "mathématiques expertes". 

Les jeunes profs suivront certes d’autres cours après ce concours, en master, pour approfondir leurs connaissances. Mais ils auront peu d’heures disciplinaires en raison de longues périodes de stage en master 1, puis de leur poste d’enseignant qu’ils occuperont à mi-temps en master 2.

"En maths, on a des candidats chez qui on va plutôt détecter leur capacité à faire des exercices d'un niveau lycée, à les faire bien évidemment, mais sans avoir la distance nécessaire pour répondre à l'interrogation d'un élève qui demanderait par exemple 'à quoi ça sert ?'", commente Pierre Priouret, prof de maths dans un lycée à Toulouse et référent pour cette matière au SNES-FSU, principal syndicat du secondaire. 

"On n'a même pas la totalité du programme de terminale qui est évalué à l'écrit du futur Capes… C'est quand même un peu inquiétant", s’alarme-t-il. "Et au moment où le gouvernement promeut ce qu'il appelle un 'choc des savoirs', on ne voit pas très bien la cohérence qu'il y a à recruter des enseignants qui vont moins bien maîtriser les savoirs enseignés".

"Les profs ne sauront plus répondre aux questions des élèves confrontés à des manipulations historiques"

En histoire-géographie, pas de question problématisée. Des intitulés vagues, comme "La Grèce classique” ou "Géographie de la France" dans le programme des thématiques à connaître pour l’épreuve écrite. Des titres que l’on pourrait retrouver dans un manuel de collège, et qui laissent penser qu’une connaissance superficielle de ces périodes suffit.  "C'est un programme qui est à la fois très large, très étendu, mais qui manque de précision", analyse Joëlle Alazard, présidente de l'Association des professeurs d'histoire et de géographie (APHG) et professeure en classes préparatoires au lycée Louis-le-Grand à Paris. 

"Ce qu'on redoute en fait, c'est que l'on forme des enseignants qui ne soient plus en mesure de répondre aux questions des élèves confrontés à des manipulations historiques”, poursuit-elle. “On a eu un exemple, récemment, avec un collègue qui avait affirmé que New York était la capitale des États-Unis : c'est gravissime", rapporte Joëlle Alazard. "Il nous faut des professeurs suffisamment préparés."

Son association appelle d’autres disciplines à se mobiliser pour réclamer un Capes plus exigeant. Des sociétés savantes et associations de professeurs de langues ont déjà rejoint la contestation. Ils organisent une assemblée générale en Sorbonne à Paris, le 25 mai prochain, et ont co-signé une pétition à ce sujet .