Les inondations meurtrières qui ont frappé la région de Valence ont coûté la vie à au moins 205 personnes. Un bilan provisoire terrifiant causé par une addition de facteurs de risque et une série de dysfonctionnements. De quoi soulever une question majeure : la France peut-elle un jour subir pareil désastre ?
Depuis trois jours, l'Espagne panse ses plaies et pleure ses morts. La région de Valence a été le théâtre d'inondations dévastatrices et meurtrières qui ont coûté la vie à 205 personnes , selon un bilan toujours provisoire, mais déjà glaçant. Terrifiantes également, ces montagnes de voitures entassées , ces sols recouverts de boue et ces images d'apocalypse qui traduisent le désespoir et le chaos.
L'ampleur de la catastrophe a choqué bien au-delà des frontières espagnoles où il faut remonter à 1973 - lorsque des inondations avaient causé la mort de 300 personnes - pour trouver trace d'un tel désastre. Il faut dire que la région de Valence présente un terrain particulièrement propice aux dégâts en cas de phénomène météorologique extrême. Les sols y sont extrêmement secs et artificialisés - conséquences de l'étalement urbain - et la ville de Valence, peuplée de quelque 800.000 habitants, se trouve en contrebas d'une vallée. Une vulnérabilité supplémentaire face au risque de ruissellement des eaux.
"Autour de Nice, ça pourrait tout à fait être imaginable"
Autant de caractéristiques que la troisième ville d'Espagne partage avec plusieurs communes françaises. Sur le pourtour méditerranéen, le volume restreint de précipitations associé à une urbanisation galopante soulève une question majeure : la France peut-elle un jour subir ce qu'a subi Valence cette semaine ?
Pour François Gemenne, climatologue et co-auteur du sixième volet du rapport du Giec, l'Hexagone est loin d'être à l'abri. "Autour de Nice par exemple ou dans d'autres villes aux alentours, ça pourrait tout à fait être imaginable. Il y a plein de zones qui sont très bétonnées où un phénomène de ruissellement est possible". D'autant que cette goutte froide , à l'origine de ces torrents de pluie, s'est déplacée vers l'Espagne depuis... la France.
Les inondations qui ont plongé l'Ardèche dans le chaos il y a 15 jours ont été causées par le même phénomène météorologique qui a ensuite sévi dans la région de Valence. Des phénomènes amenés à se produire plus fréquemment et de manière plus intense en raison du réchauffement climatique .
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Néanmoins, dans l'Hexagone, en dépit des dégâts matériels colossaux, aucun mort n'a été recensé. Miraculeux, mais pas forcément inexplicable. "À Valence, les gens n'ont pas été prévenus correctement", souligne François Gemenne. Si l'agence nationale de météorologie avait bien émis une vigilance rouge dès lundi, le système d'alerte - sous la forme d'un message accompagné d'une sonnerie stridente sur les téléphones - n'a été déployé que mardi à 20h alors que la montée des eaux submergeait déjà des quartiers entiers. Résultats, de nombreux habitants se trouvaient dehors et ont été pris au piège lorsque la situation devenait incontrôlable.
Un système prévisionnel plus efficace en France ?
Lors du dernier épisode similaire en France, le travail de prévention s'était avéré bien plus efficace. Le système de vigilance graduée allant de jaune à rouge est globalement bien respectée et permet, dans la majorité des cas, d'éviter pareil désastre humain. "Dans le cas d'une vigilance rouge, tout est piloté au niveau du ministère et les consignes sont strictes", indique Patrick Marlière, prévisionniste chez Agate-Météo.
"Il existe également des systèmes de pré-alerte. Les communes ont par exemple la possibilité d'être alertée pour un impact de foudre dans un rayon de 20km. [...] Lorsque des évènements majeurs sont en vue, les assureurs peuvent contacter les personnes concernées en amont", ajoute-t-il. Autant de dispositifs qui, jusqu'à présent, épargnent l'Hexagone.
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Mais rien n'est infaillible, tempère toutefois François Gemenne. "Il peut y avoir des ratés. Certaines personnes n'ont pas été prévenues lors des inondations en Ardèche". Des dysfonctionnements qui ne sont donc "pas à exclure" et dont l'ampleur peut se révéler inattendue.