Une femme d'affaires enlevée en pleine journée, par des hommes au visage masqué qui la forcent à monter dans une fourgonnette avant de démarrer en trombe : le scénario pourrait être celui d'un film policier. Quarante-huit heures après son spectaculaire enlèvement dans les rues de Nice, Jacqueline Veyrac, 76 ans, a été retrouvée saine et sauve, mercredi. Alors que neuf personnes se trouvent en garde à vue, les enquêteurs s'attachent désormais à reconstituer le déroulement de cette captivité.
"Vous allez devoir payer". Lundi, un rendez-vous est inscrit à l'agenda de Jacqueline Veyrac : après des mois de négociations, la millionnaire doit rencontrer des représentants d'un grand groupe au sujet de la vente du Grand Hôtel, palace qu'elle possède sur la croisette cannoise. Dans la matinée, la septuagénaire se rend dans la pharmacie niçoise où elle a ses habitudes. En sortant, alors qu'elle s'apprête à monter dans son 4x4 noir, plusieurs individus cagoulés la ceinturent et la font monter de force dans une fourgonnette, sous l'oeil médusé des passants, impuissants.
Deux heures après l'enlèvement, le fils de Jacqueline Veyrac reçoit un coup de téléphone, passé depuis le portable de sa mère, rapporte Le Parisien. Un homme affirme ne pas parler français et s'exprime dans un mauvais anglais, en ces mots : "vous avez des problèmes, vous allez devoir payer". Le fils demande à parler à sa mère, l'homme refuse, puis met fin à la conversation.
Ligotée sur le plancher. Le récit du rapt fascine, au point que de nombreux prétendus ravisseurs se signalent auprès de la police, affirmant détenir la femme d'affaires. Mais aucune piste ne porte ses fruits et la famille reste sans nouvelles de la septuagénaire pendant 48 heures. Jusqu'à ce qu'un habitant des collines de Nice-Ouest remarque une fourgonnette blanche garée dans son quartier, mercredi midi. La fausse plaque d'immatriculation, partiellement décrochée, attire son attention.
En s'approchant, l'homme aperçoit la septuagénaire, ligotée sur le plancher du véhicule qui a servi à son enlèvement. Il brise la fenêtre et libère Jacqueline Veyrac, consciente et sans blessure apparente, avant d'appeler la police. Sur place, les forces de l'ordre interpellent deux hommes, repérés alors qu'ils tentaient de s'enfuir en courant. Tous deux sont placés en garde à vue.
Des jours de filature. Mais au fil de l'enquête, les policiers s'aperçoivent que le rocambolesque scénario commence en fait avant le jour du kidnapping. L'enlèvement de Jacqueline Veyrac, à la tête d'un très convoité patrimoine immobilier depuis la mort de son époux, a été "parfaitement organisé et prévu à l'avance", selon le procureur. Un ancien paparazzi, surnommé "Tintin" et reconverti en détective privé, aurait notamment pris la septuagénaire en filature pendant plusieurs jours précédant le rapt. Il fait également partie des personnes entendues par les enquêteurs.
Les ravisseurs ont-ils voulu empêcher Jacqueline Veyrac de se rendre à son rendez-vous de lundi ? Pourquoi n'ont-ils pas réitéré leur demande de rançon ? Qui s'est occupé de la riche hôtelière lors de sa captivité ? Autant de questions auxquelles doivent encore répondre les enquêteurs. "Il y a plein d'hypothèses, aucune porte n'est fermée pour comprendre ce qui a pu pousser ces gens à enlever cette dame pour obtenir de l'argent" indiquait une source proche du dossier, mercredi.