Rendre ses transports en commun gratuits, Paris y réfléchit. C'est en tout cas le sens de l'étude lancée par Anne Hidalgo en mars, destinée à alimenter un débat public sur le sujet que l'édile veut voir lancé, avant les élections municipales de 2020. Objectif de cette étude : reconsidérer la place de la voiture dans la mobilité urbaine.
"Pour l'instant, le lien n'est pas prouvé". Mais rendre ses bus, métros ou tranways gratuits a-t-il permis de diminuer la circulation dans les villes qui l'ont testé, comme Tallinn, en Estonie, Austin, aux États-Unis, ou Singapour ? Cécile Maisonneuve, présidente du think tank La fabrique de la cité, est plutôt sceptique : "Pour l'instant, le lien n'est pas prouvé", a-t-elle expliqué dans Circuits courts, mercredi. "La réduction de l'usage de la voiture, qu'avancent les villes qui ont mis en place cette gratuité, peut être attribuée à beaucoup d'autres causes. À Austin, par exemple, ils avaient instauré la gratuité des transports en commun. Ce que l'on a observé, c'est que ça ne diminuait pas l'usage de la voiture, mais ça diminuait le nombre de personnes qui faisaient du vélo ou qui marchaient. Le report s'est fait de transports 'doux' vers d'autres transports 'doux'. Surtout, il n'y a pas d'équation systématique de ville en ville."
Comment, dès lors, faire en sorte que cette mesure ait réellement un impact sur la fluidité du trafic ? "On a mis en place un système de vélos, notamment avec assistance électrique, qui fonctionne tellement bien qu'il y a une liste d'attente. Et le vélo n'est pas en concurrence avec le bus", défend le maire de Niort Jérôme Baloge, dont la ville teste la gratuité des transports en commun depuis neuf mois. Pas de baisse vérifiée du trafic, cependant, dans le chef-lieu des Deux-Sèvres : "Il y a plus de monde dans les bus, mais c'est difficile d'objectiver ce report."
La solution des bonus ? Entre un système "classique" et la gratuité totale, la modulation des tarifs est une solution intermédiaire qui a inspiré Singapour, territoire pas plus grand que 60% de l'Ile-de-France et proche de la saturation. "Là-bas, ils mènent une politique très offensive pour limiter la place de la voiture", raconte Cécile Maisonneuve. "Ils ont instauré un bonus pour ceux qui prennent le bus ou le métro plus tôt le matin, avec des tarifs moins chers, un peu comme l'effacement dans le secteur de l'électricité. Cela a réduit de 6% le trafic aux heures de pointe et ça a développé l'impression de confort."