Que la France soit frappée par les orages au mois de mai, voilà qui n’a rien d’exceptionnel. Qu’elle le soit aussi souvent, de manière aussi répétée et aussi violente, voilà qui sort en revanche de l’ordinaire. 182.796 impacts de foudre ont ainsi été enregistrés du 1er au 30 mai, un record battu dans les grandes largeurs. La précédente marque datait de mai 2009, avec 98.561 impacts enregistrés. Et la semaine qui vient s’annonce elle aussi très agitée. Dans un contexte global de réchauffement climatique, y a-t-il un lien entre cette hausse des températures et l’intensité du phénomène orageux actuel. La France doit-elle s’habituer à vivre des mois de mai orageux à l’avenir ? C’est évidemment un peu plus compliqué que cela.
- Un manque de recul
Si les météorologues refusent de répondre sans nuance à cette question, c’est d’abord parce que le nombre d’impact de foudre n’est mesuré en France que depuis 2000. "On n’a pas assez de recul sur les données, notamment équivalentes, c'est-à-dire collectées dans des même conditions de mesure. Je ne peux donc pas vous dire il n’y a aucun lien, mais je ne peux pas vous dire l’inverse non plus", explique à Europe 1 Stéven Testelin, prévisionniste à Météo France. "La situation actuelle est exceptionnelle, il y a eu un record, mais il n'y a pas le recul suffisant pour parler de phénomène centenaire", confirme Robert Vautard, climatologue, chercheur au Laboratoire des Sciences du climat et de l'environnement (LSCE), interrogé par BFMTV.
- Des précipitations plus intenses, liées au réchauffement
S’il est donc impossible de lier réchauffement climatique et orages plus nombreux, il existe bel et bien un lien avec la force des phénomènes. "On aura à l’avenir des intensités de précipitations plus fortes", prévient Stéven Testelin, de Météo France. "L’augmentation de température permet d’avoir plus d’eau dans l’atmosphère, et lorsqu’il y a des orages, ça fait plus d’eau qui descend. Donc on a des phénomènes plus violents. C’est plus là qu'est le lien avec le changement climatique", complète Robert Vautard, du LSCE.
- La chaleur en Scandinavie, l’une des causes des orages
Autre lien possible entre le réchauffement climatique et les orages en France ? La douceur du mois de mai en Scandinavie. "On est à 4 ou 5 degrés de plus que la normale. On n’avait jamais vu ça là-bas. C’est le mois de mai le plus haut jamais enregistré dans des pays comme la Suède, le Danemark ou la Norvège", relève sur BFMTV Guillaume Séchet, météorologiste, créateur du site meteo-paris.com. Cela, on peut quand même le lier au réchauffement, et c’est surtout de cela dont il faut s’inquiéter", poursuit-il.
Or, s’il n’y a pas de lien direct avec les orages en France, la douceur en Scandinavie est l’un des éléments constitutifs du phénomène actuel. "Elle a tendance à pousser l’air froid en haute altitude au-dessus de nos têtes", explique Stéven Testelin. "Or, c’est précisément la conjonction de cet air froid en haute altitude et d’un air chaud en basse altitude qui provoque des masses orageuses."
- Orages en mai, pas de canicule en été ?
Cela dit, si le phénomène d’orages violents, accompagnés de pluies diluviennes, venait à se répéter à l’avenir, il pourrait y avoir une conséquence vertueuse. "Plus on a d’humidité dans les sols, moins on a des chances d’avoir des vagues de chaleur en été", assure Guillaume Séchet. "Le risque de connaître une canicule sans fin comme en 2003 est donc a priori plus faible", pronostique le météorologiste.