La politique d'éducation prioritaire, qui vise à réduire les écarts scolaires liés aux origines sociales des élèves, n'a pas atteint ses objectifs, estime la Cour des comptes, préconisant de recentrer les efforts sur le primaire et les établissements les plus défavorisés.
Des écarts importants qui demeurent. Dans un rapport publié mercredi, la Cour dresse un bilan "décevant" de cette politique, sur laquelle s'appuient les gouvernements successifs depuis près de 40 ans pour aider les établissements situés dans des zones socialement défavorisées. Elle concentre des moyens (1,7 milliard d'euros en 2017) au bénéfice de 20% des élèves dans plus de 1.000 réseaux réunissant collèges et écoles, dont 350 en éducation prioritaire renforcée (REP+), les autres en REP. Son objectif était de réduire à moins de 10% les écarts de niveau entre les élèves scolarisés en éducation prioritaire et les autres.
Diverses études internationales, notamment Pisa, montrent en effet qu'en France, plus qu'ailleurs, les inégalités sociales pèsent sur les résultats des élèves. Or, selon la Cour des comptes, qui a débuté ses travaux sur le sujet il y a deux ans, la politique d'éducation prioritaire n'a pas atteint son objectif. L'effet de la scolarisation en éducation prioritaire sur les résultats des élèves est même "très faible". Ainsi, au collège, si les écarts de performance en mathématiques et en français ne se détériorent plus, ils restent de l'ordre de 20% à 30% selon les disciplines et les années.
"Ces années-là sont essentielles". La Cour trouve plusieurs explications à ces résultats décevants : l'outil le plus efficace, la réduction de la taille des classes, est resté trop longtemps modeste et pas assez orienté vers les REP+ et le premier degré (maternelle et primaire). "Ce n'est pas le premier rapport dans lequel nous préconisons de redéployer les moyens de l'éducation nationale en faveur du primaire, ces années-là sont essentielles", a insisté mercredi le premier président de la Cour des Comptes Didier Migaud, en présentant le rapport.
Le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer a lancé depuis l'an dernier le dédoublement des classes de CP et CE1 en REP+ et en REP, ce qui semble correspondre aux recommandations de la Cour. Mais cette dernière préconise de concentrer cette mesure "très coûteuse" à la fois sur les trois premières années des apprentissages fondamentaux (grande section de maternelle, CP, CE1) et sur les zones les plus difficiles. Un autre "levier à approfondir", selon les auteurs du rapport, serait de renforcer l'attractivité des postes en éducation prioritaire. Les enseignants qui sont affectés dans ces quartiers défavorisés sont souvent les moins expérimentés et l'absentéisme des profs y est plus marqué, avec un recours fréquent à des contractuels.