C’est un sujet délicat pour tous les parents : comment aborder le sujet de la sexualité avec ses enfants ? Aurélien, 21 ans, n’en a jamais parlé avec sa famille. Cette absence de discussion a marqué le jeune homme, qui s’inquiète d’avoir du mal à parler de sexe. Comment peut-il remédier à cette situation ? Et, plus largement, comment peut-on parler de sexualité avec son enfant ? La sexologue Catherine Blanc répond à la question dans l’émission "Sans Rendez-Vous" sur Europe 1.
La question d’Aurélien, 21 ans :
"Mes parents ne parlaient pas de sexe quand j’étais petit. Du coup j’ai du mal à en parler aujourd’hui. Comment remédier à cela aujourd’hui, alors que je suis adulte ?"
La réponse de Catherine Blanc
Est-on obligé de parler de sexualité à son enfant ?
Non, bien sûr que non. Toute une génération s’est exprimée sur cette question, du fait que les parents ne parlaient pas de sexualité. Avant les années 1970, il n’était pas question de parler de sexualité. A partir des années 1970, il était question d’en parler, et dès qu’une famille n’avait pas cette communication on recevait des patients qui disaient en souffrir. Mais on reçoit aussi des patients traumatisés parce que leurs parents leur parlaient de sexualité.
Ce n’est pas important ce que les parents disent. C’est difficile de parler de la sexualité avec ses parents, parce que nous avons peur que ça suscite de l’excitation ou une curiosité, et que ça mêle nos parents à cette excitation et cette curiosité. L’idée que ça pourrait déclencher quelque chose d’œdipien, ou d’incestuel. Si les parents interdisent d’en parler, c’est autre chose. Mais ne pas en parler, c’est aussi laisser les enfants glaner leurs informations et leur curiosité par eux-mêmes.
Si les parents ne parlent pas de sexualité, le risque n’est-il pas que ce soit la pornographie qui les éduque ?
Oui, vous avez raison. Le monde de la pornographie est rentré dans le quotidien des gens. Ce n’est pas comme quand il fallait des démarches incroyables pour avoir accès à des images pornographiques. Aujourd’hui, Aurélien n’a pas eu de discours sur la sexualité, il peut se dire qu’il peut apprendre à mettre des mots dessus.
Mais est-on obligé de parler de sexualité ?
Non on n’est pas obligé. On a le droit à nos pudeurs, nous n’avons pas tous la même compétence à accueillir les mots, car ils portent nos fantasmes. Nous devons respecter les pudeurs de chacun. Ne pas en avoir parler ne veut pas dire poser un interdit. Les parents d’Aurélien n’ont pas posé un interdit, ils ont respecté sa pudeur. Il peut réfléchir à ce qu’il veut communiquer ou non, dans le respect de sa propre pudeur.
Si on est mal à l’aise pour en parler, peut-on donner un préservatif discrètement à un enfant, avant qu’il parte à une soirée par exemple ?
C’est compliqué de procéder ainsi, c’est donner une injection à faire l’amour. Dire : ‘si jamais tu avais envie, voici de quoi te protéger’, ce n’est pas la même chose que de glisser le préservatif et dire implicitement ‘tu devrais passer à l’acte’. Si on est mal à l’aise pour en parler à son enfant, c’est plutôt à un parrain, une marraine, quelqu’un de proche de l’enfant et en tranquillité, de le dire de manière humoristique et de manière souple.