Iannis Roder 4:34
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Un sondage de l'Ifop publié mercredi, moins de trois mois après l'assassinat de Samuel Paty, montre que près de la moitié des enseignants se sont déjà autocensurés. Au micro d'Europe 1, Iannis Roder, directeur de l'Observatoire de l'éducation de la Fondation Jean-Jaurès, analyse cette enquête et évoque les réponses à apporter.
INTERVIEW

La laïcité s'enseigne-t-elle dans un climat totalement apaisé à l'école, en 2021 ? Non, répondent les auteurs d'une enquête de l'Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès, dont les résultats ont été publiés mercredi : 49% des enseignants du secondaire se sont déjà autocensurés dans leur enseignement des questions religieuses afin de ne pas provoquer de possibles incidents dans leur classe. Pour Iannis Roder, directeur de l'Observatoire de l'éducation de la Fondation Jean-Jaurès et invité d'Europe 1, mercredi midi, ces chiffres issus d'un échantillon de 800 enseignants sont véritablement "inquiétants".

Une contestation, "plusieurs visages"

Face à ce phénomène qui peut "prendre plusieurs visages", d'une manifestation hostile pendant l'hommage à Samuel Paty (19% des enseignants disent l'avoir vue ou constatée) à l'évitement de la piscine (45% des enseignants disent avoir été témoins d'un évitement de jeunes filles pour la piscine) en passant par la contestation d'un enseignement, "il est évident que les fonctionnaires de la République que sont les enseignants, les personnels de direction et les corps d'inspection doivent faire bloc", insiste Iannis Roder. 

"Ceux qui tentent de contrarier l'école de la République pour des raisons religieuses rigoristes radicales doivent trouver en face d'eux un bloc extrêmement solide sur ses bases", poursuit le membre du think tank classé à gauche. Au coeur de ce "bloc" doit jouer "la solidarité entre les enseignants et entre corps de direction et monde enseignant."

"Manque de soutien"

C'est d'ailleurs cette solidarité qui pêche aujourd'hui, pointe Iannis Roder : "Notre sondage montre qu'il y a un sentiment important de manque de soutien de la part des personnels de direction et du rectorat aux enseignants, c'est ce qu'il faudrait absolument corriger", souligne-t-il. 

Ce manque de soutien et cette "peur de la complaisance de la part de personnels de direction" se traduisent par un manque dans la remontée d'incidents. "L'étude montre que 16% des enseignants ne signalent pas d'incidents et 54% de ceux qui signalent l'incident le signalent à leur personnel de direction, soit un peu plus de la moitié seulement. Le reste des enseignants se tournent vers leurs collègues. Mais ceux qui vont régler le problème, ce sont les personnels de direction", observe Iannis Roder.